Recension: Kappeler, Andreas (2017, 2022). Russes et Ukrainiens, les frères inégaux. Du Moyen-Âge à nous jours. Paris, CNRS Éditions.

Regards géopolitiques, v9n3, 2023.

Kappeler, Andreas (2017, 2022). Russes et Ukrainiens, les frères inégaux. Du Moyen-Âge à nous jours. Paris, CNRS Éditions.

Depuis l’annexion de la Crimée et le déclenchement du conflit du Donbass en 2014, l’Ukraine a été constamment confrontée à diverses formes de pression militaire de la Russie. L’invasion de 2022 témoigne de la volonté renouvelée du gouvernement de Vladimir Poutine de mettre sous tutelle son voisin occidental, voire d’anéantir l’État ukrainien puisque l’objectif de la campagne de 2022 n’était pas de se contenter du Donbass mais de prendre Kyiv et sans doute de remplacer le pouvoir en place. La guerre, justifiée à Moscou par des « nécessités historiques » et la mission de protection des minorités russophones de l’Est de l’Ukraine – qui ne se sont pas ralliées à l’armée russe en 2022 – s’appuie sur une vision de type impérial selon laquelle le destin de la Russie serait de contrôler les territoires qui l’entourent et qui constituent des territoires habités de peuples frères – mais de petits frères, ukrainiens et biélorusses.

Un détour par l’histoire s’impose pour mettre à nu cet édifice idéologique. Chercheur spécialiste des empires à l’est de l’Europe, Andreas Kappeler analyse avec finesse l’évolution des rapports entre l’Ukraine et la Russie depuis le Moyen Âge, et des représentations associées. D’emblée, il rappelle une réserve nécessaire : l’Ukraine ou la Russie n’existaient pas comme État ou comme nation au début du Moyen-Âge, comme la plupart des nations européennes, constructions socio-politiques récentes, et il serait risqué de chercher à conforter une lecture a posteriori de l’existence des nations russe et ukrainienne dans l’histoire ainsi narrée et exposée. Les représentations nationales émergent en Europe à partir du XVIIIe siècle (Hermet, 1996 ; Thiesse, 1999; Anderson, 2006). L’auteur montre pourquoi l’unité, présentée comme « naturelle » par Moscou, des peuples ukrainien et russe est un mythe : il n’y avait aucune représentation allant dans le sens de relations privilégiées entre les peuples des régions aujourd’hui habitées par les Russes et les Ukrainiens, ni de représentation de l’existence de deux nations proches. Si les deux peuples se disputent encore l’héritage historique de la Rous’ de Kyiv, leurs trajectoires divergent à partir du XIIIe siècle. Il est essentiel de revenir sur les interactions, les rencontres entre ces « frères inégaux », mais aussi sur les processus de distanciation et de construction des identités nationales, ainsi que sur les cultures mémorielles et usages politiques différenciés de l’histoire.

L’auteur établit tout d’abord un portrait chronologique étayé de l’histoire de l’Ukraine et de la Russie, de façon que le lecteur occidental puisse prendre la mesure d’un passé complexe. Cet ouvrage a donc une dimension salutairement didactique. L’auteur mobilise une documentation étendue pour mettre en évidence l’émergence et le développement d’une relation russo-ukrainienne, dans laquelle on ne décèle pas ni d trace de prééminence politique ni culturelle pendant de longs siècles. Cette analyse permet de comprendre que l’émergence des consciences nationales et des États actuels, ainsi que des rapports entre peuples, est le résultat d’un enchaînement de contingences, plutôt que la suite logique d’un quelconque événement fondateur unique – prétendument incarné dans l’existence du royaume slave oriental de la Rous’ de Kyiv/Kiev, puissante principauté à l’origine fondée par les Varègues (Vikings suédois) au IXe siècle, et qui s’est désintégrée au XIIIe siècle en une multitude de principautés, dont celle de Moscovie apparue au XIIIe siècle, futur embryon de la Russie et qui n’a donc pas le monopole de l’héritage historique de la principauté de Kyiv. Aujourd’hui, tant les discours historiques russe qu’ukrainien revendiquent l’héritage culturel de cette construction politique – sans que cela puisse nécessairement poser problème, tant abondent les exemples d’héritages croisés de nos jours, la France, l’Italie ou l’Espagne par exemple pouvant se réclamer de cultures latines héritées de la Rome antique. C’est lorsque le débat se politise et que la revendication de l’héritage se veut exclusif, à tout le moins marqué d’une hiérarchie, que l’analyse historique prend un tour instrumentalisé par le pouvoir.

L’auteur rappelle ainsi avec à propos que l’histoire des deux peuples aujourd’hui appelés russe et ukrainien a d’abord divergé, les Slaves les plus orientaux se trouvant répartis en diverses principautés longtemps soumises aux Mongols, tandis que les futurs Ukrainiens ont été incorporés au Grand-Duché de Lituanie puis au royaume de Pologne, dont les réseaux culturels, commerciaux et politiques étaient orientés vers l’Europe. C’est essentiellement pour des raisons de contingence historique que s’opère le rapprochement entre Russes et Ukrainiens : lors de la rébellion des Cosaques ukrainiens de 1648 (soulèvement de Khmelnytsky), les difficultés militaires de ceux-ci face aux troupes polonaises les ont conduits à solliciter l’appui militaire du tsar Alexandre 1er, à travers l’accord de Pereiaslav (1654). Le rapprochement graduel entre Russes et Ukrainiens qui s’est produit dans le sillage de cet accord apparaît comme une véritable césure marquée par une divergence majeure quant à son interprétation, selon qu’elle est considérée comme une union soit temporaire et opportuniste (version ukrainienne), soit définitive et conforme à la convergence présentée comme « naturelle » entre deux peuples frères, selon la lecture russe a posteriori. A ce propos, il n’est pas inutile de rappeler que le tsar Alexandre 1er s’était montré initialement fort réticent envers cet accord et l’idée d’entrer en guerre contre la Pologne pour soutenir les Cosaques, relativisant l’idée de destinée manifeste entre les deux peuples. Initiative ukrainienne, ce rapprochement, aux yeux des Ukrainiens, ne signifiait en rien la reconnaissance d’une relation de subordination culturelle ou politique.

Mais le livre Russes et Ukrainiens ne se résume pas à cette analyse sur mille ans de la construction de la relation russo-ukrainienne, au miroir de l’évolution des États et des sociétés. C’est aussi une réflexion en filigrane sur la construction des récits historiques et des représentations identitaires: comment les chroniqueurs et historiens ont-ils interprété et réinterprété les éléments historiques ? Quels discours ont-ils élaborés ? Partant des textes anciens, de sources littéraires ou des premières histoires savantes, l’ouvrage met en évidence les principaux moments d’élaboration des récits historiques en éclairant tout particulièrement les écrits des XIXe et XXe siècles, au moment où se précisent les discours et représentations sur les nations ukrainienne et russe – tard venus dans les deux cas, comme le souligne l’auteur.

Enfin, le troisième niveau de réflexion auquel nous introduit le livre porte sur les usages politiques de cette histoire croisée des regards portés de part et d’autre. Bien sûr, il est clair que la question centrale de l’auteur est l’instrumentalisation des arguments historiques par le pouvoir russe actuel, lequel remonte constamment au « baptême de la Rous’ » à Kyiv en 988, pour justifier ses entreprises militaires en Ukraine depuis 2014. Mais l’auteur explore aussi divers autres épisodes d’instrumentalisation, dont par exemple l’annexion des terres sous domination polonaise en rive droite du Dniepr par Catherine II (1793). L’impératrice justifia alors cette annexion par un supposé devoir de protection envers ses compatriotes orthodoxes, des serfs ukrainiens dont le sort au quotidien continuerait pourtant, pendant des décennies, d’être réglé par les maîtres de ces terres, des seigneurs polonais dont la domination sociale n’allait nullement être remise en cause.

L’auteur se livre donc à cet exercice d’analyse historique, non pas seulement comme entreprise d’érudition, mais afin de mettre en perspective le discours politique russe de justification de la guerre entamée en 2014 dans le Donbass puis étendue en 2022 avec l’invasion générale de l’Ukraine par l’armée russe. Au-delà de cet exercice de déconstruction des discours et des représentations nationales et historiques, il rappelle qu’il serait hasardeux de réduire la décision de Vladimir Poutine de recourir à la guerre à des représentations historiques. Celles-ci ont pu jouer dans la modulation du discours russe, mais ne sauraient à elles seules déclencher le conflit – il n’y a pas de déterminisme historique. Il y a eu décision politique dont la racine tient à la lecture par le pouvoir en place au Kremlin de la dynamique politique de l’Europe, de l’Ukraine et du pouvoir russe, et à la crainte de celui-ci de perdre le contrôle tant de l’Ukraine, dont la trajectoire s’orientait vers un rapprochement avec l’Europe, que de la société civile russe face à l’émergence graduelle d’une société à la démocratie certes imparfaite mais bien différente de la société russe confrontée à l’affermissement de l’autocratie de Vladimir Poutine. La crainte d’une contagion et d’une perte de contrôle de la société ukrainienne, toutes deux menaçantes pour le pouvoir en place, aurait convaincu celui-ci de recourir à la force et donc de mobiliser des représentations historiques fortes que le pouvoir avait su distiller et qui correspondaient par ailleurs à la lecture de plusieurs nostalgiques du passé impérial de la Russie.  Par ailleurs, on ne peut s’empêcher de souligner que, autant le discours de Vladimir Poutine insiste sur l’unité des peuples russe et ukrainien et sur l’inexistence historique de l’Ukraine, autant l’invasion de 2022 a précipité l’émergence d’un vif sentiment anti-russe qui n’existait guère auparavant.  De ce point de vue, la guerre a semé un durable divorce entre la Russie et l’Ukraine.

Frédéric Lasserre

Directeur du CQEG

Références

Anderson, B. (2006). Imagined communities: Reflections on the origin and spread of nationalism. New York : Verso.

Hermet, G. (1996). Histoire des nations et du nationalisme en Europe. Paris : Le Seuil.

Thiesse, A.-M. (1999). La création des identités nationales. Europe, XVIIIe-XXe siècle. Paris : Le Seuil.

Guerre en Ukraine. Quelles causes ? Quelles conséquences pour les relations russo-chinoises ?

RG v8n1, 2022

Frédéric Lasserre et Olga Alexeeva

Frédéric Lasserre est directeur du Conseil québécois d’Études géopolitiques et professeur au département de Géographie de l’Université Laval.  Frederic.lasserre@ggr.ulaval.ca

Olga Alexeeva est professeure au département d’Histoire de l’UQAM et chercheure au CQEG. Alexeeva.olga@uqam.ca

Résumé : le conflit qui embrase l’Ukraine depuis le 21 février 2022, date de l’annonce de l’entrée des troupes russes dans le Donbass, trouve ses origines dans la recomposition politique internes à l’Ukraine, mais aussi dans les représentations que nourrit la Russie et son président Vladimir Poutine à son endroit. Quelles sont ces représentations ?  La Chine pourrait-elle jouer un rôle dans l’évolution de ce conflit ?

Mots-clés : Ukraine, Russie, guerre, Donbass, représentations, Chine.

Summary : the conflict that has set Ukraine ablaze since February 21, 2022 has its origins in the internal political recomposition of Ukraine, but also in the representations that Russia and its President Vladimir Putin nurture about the former Soviet republic. What are these representations? Could China play a role in the evolution of this conflict?

Keywords : Ukraine, Russia, war, Donbass, représentations, China.

Le 21 février 2002, le président russe Vladimir Poutine a officiellement reconnu l’indépendance des deux républiques sécessionnistes de Lougansk et de Donetsk, et a ordonné aux troupes russes de se déployer dans ces territoires pour en assurer la sécurité, ce qui constituait déjà en soi un acte de guerre contre l’Ukraine. Mais l’attaque de l’Ukraine sur plusieurs fronts, annoncée le 23 février, souligne que là n’était sans doute pas le seul objectif du président russe. Quelles sont les raisons de cette invasion? Et quelles répercussions principales peut-on entrevoir à la suite du déclenchement de ce conflit majeur, le premier entre États en Europe depuis 1945, ou depuis les guerres yougoslaves (1991-1995, 1999) ? La Russie semble s’appuyer sur le support tacite de la Chine de sa politique expansionniste en Ukraine, le support censé de lui aider à faire face aux sanctions occidentales. Quelle fut la réaction initiale de Pékin à l’invasion russe de l’Ukraine ? Comment cette réaction a évalué au fil de jours ? Quelles seraient les conséquences de cette crise pour la stabilité en Asie ?

  1. Un conflit déjà ancien en Ukraine

La cristallisation du conflit en Ukraine n’est pas un phénomène récent. À la sécession de la Crimée en février 2014, soutenue par des troupes masquées et sans insignes, mais fortement armées dont on a fortement soupçonné l’appartenance à l’armée russe (Norberg, 2014) succédait l’annexion par la Russie en mars 2014 (Biersack and O’Lear, 2014; Grant, 2015). Quelques mois plus tard, deux zones du Donbass, région de l’Est de l’Ukraine, ont tenté de reproduire le même scénario avec la sécession des deux républiques autoproclamées de Donetsk et de Lougansk. Cette sécession a là encore été soutenue par la Russie, financièrement, logistiquement en armes et possiblement par des conseillers voire des soldats sans insigne (Barabanov, 2015; Campana, 2016). Elle a aussi et notamment été marquée par deux référendums tenus dans les zones contrôlées par les rebelles le 11 mai 2014, lesquels ont servi de caution consultative aux déclarations d’indépendance. Après plusieurs mois d’affrontements et la prise de Debaltsevo par les rebelles, l’accord de Minsk II du 12 février 2015 a permis un cessez-le-feu, précaire et souvent émaillé de combats sporadiques marqués par des duels d’artiellerie tout au long des années suivantes (Henrotin, 2020). L’Ukraine était très réticente à signer cet accord, notamment parce qu’il impliquait de reconnaître une légitimité et un statut spécial aux séparatistes, et donc de légitimer un éventuel nouveau référendum d’autodétermination. La réalité du rapport de forces sur le terrain a néanmoins forcé Kiev[1] à se résigner à cet accord imparfait, qui octroyait de facto un levier de pression important de Moscou sur l’Ukraine (Boulègue, 2018).

Figure 1. Les républiques sécessionnistes du Donbass

Source : Le Parisien, 22 février 2022, https://tinyurl.com/Donbass-secessionnistes

2. Représentations russes : de la sécurité à la défense des russophones hors Russie

Les raisons évoquées par la Russie pour justifier ou légitimer l’invasion de l’Ukraine avant l’attaque du 23 février sont de trois ordres. On y retrouve le déni de légitimité à l’Ukraine ; le souci de la défense des russophones du Donbass ; la crainte de voir l’Ukraine, pays frontalier de la Russie, devenir membre de l’OTAN et de l’Union européenne.

2.1. La défense des russophones hors de Russie

Cet argument a souvent été invoqué par Moscou pour justifier les pressions que la Russie a pu exercer sur ses voisins. On peut penser à l’Estonie et à la Lettonie (Pundziūtė-Gallois, 2015) jusqu’en 2014. Dans sa justification de son annexion de la Crimée, le président Poutine évoquait ainsi la défense des minorités russes face au désir d’assimilation prêté aux autorités ukrainiennes (Bebier, 2015). Si le désir de développement de la langue ukrainienne dans la sphère publique était bien réel (Fournier, 2002), il n’en demeure pas moins que ce débat linguistique interne à l’Ukraine semble avoir été manipulé par Moscou et par les séparatistes du Donbass. En effet, une part notable de la population russophone d’Ukraine ne souscrivait pas à l’alarmisme des discours sur l’oppression culturelle dont aurait été l’objet la minorité russophone d’Ukraine, et est demeurée fidèle au gouvernement de Kiev (Laruelle, 2016; Pop-Eleches et Robertson, 2018; Boisvert, 2022). Dans le déroulement de la guerre de 2022, si le 21 février le président Poutine ordonne effectivement aux troupes russes d’entrer dans le Donbass pour y protéger les républiques de Donetsk et de Lougansk, s’il reconnait de plus la revendication de ces républiques sur l’ensemble du Donbass alors qu’elles n’en contrôlent que le tiers (Moscow Times, 2022), le fait que 2 jours plus tard l’offensive majeure russe porte sur la région de Kiev laisse entendre que l’objectif prioritaire de Moscou n’était pas la défense des russophones. De plus, cet argument n’explique pas l’urgence : si les accords de Minsk demeuraient très imparfaits et semblaient offrir peu d’issue, l’existence des républiques sécessionnistes n’était pas menacée, Kiev, malgré le renforcement récent de son armée, n’ayant guère les moyens militaires de reconquérir ces territoires bien soutenus militairement et politiquement par Moscou.

2.2. La menace de l’OTAN

À la suite du sommet OTAN-Russie de 2008, Vladimir Poutine, alors Premier ministre, aurait déclaré que si l’Ukraine rejoignait l’OTAN, son pays pourrait envisager l’annexion de l’Ukraine orientale et de la Crimée (Українська Правда, 2008). À tout le moins, il aurait vivement protesté auprès du président américain George Bush lorsque fut évoquée la possibilité d’une adhésion de l’Ukraine et de la Géorgie (Harding et al, 2008), soulignant que l’Ukraine n’avait pas de légitimité politique (Baer, 2018). La décision des Occidentaux d’admettre les pays baltes au sein de l’OTAN, puis d’envisager l’adhésion d’autres ex-républiques soviétiques, dont l’Ukraine, a fortement irrité le gouvernement russe, accélérant une désillusion de la part de Vladimir Poutine. Pourtant plusieurs analystes estiment que celui-ci envisageait, au début de ses premières présidences (2000-2004, 2004-2008), une collaboration réelle avec les Occidentaux (Shlapentokh, 2021), pour ensuite être déçu face à l’attitude qu’il percevait volontiers comme arrogante et hégémonique de la part de Washington, évolution perceptible dès son discours de Munich en 2007 (Poutine, 2007; Zecchini, 2007).

Le discours du président Poutine a beaucoup mis l’accent sur l’expansion de l’OTAN vers la Russie, intégrant tout d’abord plusieurs pays d’Europe de l’Est, puis d’anciennes républiques soviétiques avec les trois pays baltes en 2004. « L’attitude de la Russie d’aujourd’hui rappelle celle de la France d’il y a deux siècles : contre qui l’OTAN est-elle alliée ? Pour Moscou, la seule réponse possible à cette question est : la Russie. Comme l’a fait remarquer un témoin devant un comité parlementaire en Grande-Bretagne, aux yeux des Russes, ‘l’idée que l’OTAN ne soit pas anti-russe est saugrenue.’ » (UK Parliament, 2007). Percevant l’OTAN comme une alliance antirusse, Poutine rappelle aussi aux Occidentaux que ceux-ci avaient promis, lors des derniers instants de l’URSS, que l’alliance atlantique ne serait pas étendue vers l’Est (Sarotte, 2010, 2021), nourrissant le sentiment de trahison (Mearsheimer, 2014).

Mais au-delà de l’amertume de voir l’OTAN s’étendre vers l’Est et admettre d’anciens pays du pacte de Varsovie ou d’anciennes républiques soviétiques devenues indépendantes, la possibilité d’une adhésion de l’Ukraine était-elle une menace sérieuse ? Était-elle envisagée à court terme par l’OTAN ?  En réalité, même si le président ukrainien Porochenko avait effectivement demandé l’adhésion de son pays au sein de l’Alliance en 2014, décision confirmée par l’abandon du statut de neutralité en décembre 2014 suite à l’annexion de la Crimée et à la guerre dans le Donbass (Interfax, 2014), cette adhésion était peu probable et guère envisagée par les gouvernements occidentaux, car ne suscitant pas de consensus— surtout dans un contexte de vives tensions avec Moscou (Wong and Jakes, 2022; South China Morning Post, 2022; Pommiers, 2022). De plus — gesticulation ou reflet des représentations réelles — les dirigeants russes ont à plusieurs reprises qualifié l’OTAN de « tigre de papier » (Spiegel, 2008; Pommiers, 2022). Quoi qu’il en soit, s’il est certain que Moscou perçoit l’OTAN et les États-Unis comme leur principal rival, l’Ukraine ne constituait pas une menace à court ou moyen terme, son adhésion au sein de l’Alliance n’étant plus à l’ordre du jour.

2.3. Le déni de légitimité de l’Ukraine

Le président Poutine et d’autres responsables russes ont longtemps développé l’idée selon laquelle l’Ukraine n’avait pas d’existence propre comme nation, que l’Ukraine et la Russie (tout comme la Biélorussie) formaient en réalité un seul et même peuple, et que l’existence de l’État ukrainien n’était donc due qu’aux conséquences de la chute de l’URSS (Kuzio, 2006, 2019; Baer, 2018; Pawliw, 2018). Ils reprenaient en ce sens des représentations historiques anciennes proches de l’eurasisme, la doctrine politique soulignant la destinée ni européenne ni asiatique, mais spécifique de la nation russe (Shlapentokh, 2021). Les arguments de la défense de la minorité russe du Donbass ou de la menace de l’OTAN semblant peu crédibles pour expliquer le déclenchement de la guerre, faut-il voir dans l’offensive russe la marque d’un désir de revanche sur l’histoire, de réintégration de ce qui n’aurait jamais dû être séparé de la Russie ? Avec en sus, une possible peur d’ordre idéologique, la crainte que le temps passant, l’Ukraine, si proche de la Russie aux yeux du président russe, ne devienne le symbole de ce qu’aurait pu être une Russie démocratique (Iakimenko et Pachkov, 2014; Wilson, 2014; Frachon, 2022).

Si cette représentation du caractère illégitime de l’existence de l’Ukraine a bien contribué au déclenchement de la guerre, on peut cependant se demander pourquoi maintenant, alors que cette représentation n’est pas nouvelle, y compris dans la pensée du président russe. Vladimir Poutine espérait-il susciter l’adhésion de l’opinion publique, comme en 2014 à la suite de l’annexion de la Crimée (Balzer, 2015), alors que la crise économique et la gestion de la Covid-19 avaient écorné sa popularité ? (Dobrokhotov, 2020; Semenov, 2021) Si tant est que le président s’inquiète réellement de l’opinion publique russe, il semble que le pari était gagnable, alors que l’image du gouvernement russe avait bénéficié de la fermeté dont faisait preuve Moscou face à l’Ukraine avant le déclenchement du conflit (Burakovsky, 2022). Il reste à voir si ce regain sera pérenne. Cette question se trouve au cœur des analyses de plusieurs experts, y compris des analystes russes opposants au régime. Certains d’entre eux affirment que la guerre en Ukraine figurait dans les plans de Poutine même avant 2014 : initialement prévue pour le printemps 2020, l’invasion aurait été ensuite décalée à cause de l’épidémie de la Covid-19 (Solovei, 2022). D’autres soulignent un manque de compréhension du contexte international de la part de Poutine, qui aurait envisagé de gagner la guerre rapidement en mettant l’UE et les États-Unis devant le fait accompli, comme ce fut le cas lors de l’annexion de la Crimée en 2014, et qui ne s’attendait pas à la réaction aussi ferme de la part du Global West (Meduza, 2022). Finalement, il y a aussi ceux qui voient dans cette guerre un soubresaut final de l’Empire russe—soubresaut qui ne ferait que précipiter sa chute (Pastukhov, 2022).

3. La position de la Chine : refus de condamner, refus de soutenir

Le déclenchement de cette guerre a suscité nombre d’interrogations quant à la position qu’adopterait la Chine, partenaire économique majeur de la Russie, mais avec qui aucune alliance formelle n’a encore été conclue. Depuis le début de la guerre, les autorités chinoises semblent se réfugier derrière le mutisme de ses médias officiels, qui ne diffusent que de brefs reportages sur la situation en Ukraine à la fin des bulletins d’information (White et al., 2022), et la répétition de formules diplomatiques habituelles qui mettent en avant les principes de la non-ingérence et du respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États. Dans les jours qui suivent le début de « l’opération spéciale » russe, les communiqués officiels chinois continuaient à être prudents, mais l’attitude de Pékin paraît de plus en plus en décalage par rapport aux réactions du reste du monde. L’invasion russe de l’Ukraine met à l’épreuve la politique d’affirmation de la Chine sur la scène internationale, tout en compromettant les efforts de Pékin à construire un partenariat stratégique avec Moscou.

3.1. Protéger les intérêts chinois et minimiser l’impact de la crise en Ukraine sur l’économie chinoise

Bien que depuis l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping la Chine ait développé un véritable partenariat stratégique avec la Russie, Pékin a toujours gardé une certaine distance vis-à-vis des ambitions territoriales de Poutine en Ukraine de l’Est. La Chine a d’ailleurs activement promu les relations bilatérales avec Kiev, en signant plusieurs accords d’intention visant à réaliser différents projets d’infrastructure en Ukraine. Par exemple, China Road and Bridge s’est engagé à investir 400 millions de dollars dans la reconstruction du pont Shuliavsky à Kiev, alors que China Harbour Engineering a obtenu un contrat d’un milliard de dollars pour le dragage du port de Youjne (Katsilo et al., 2017). En 2020, la Chine est devenue le premier partenaire commercial de l’Ukraine : le volume d’échanges a alors battu tous les records en atteignant 15,4 milliards de dollars américains. En parallèle, les compagnies chinoises ont démontré un intérêt particulier pour le secteur agricole, en investissant dans la production de la viande et des céréales (InVenture, 2021).

Ainsi, le rapprochement stratégique avec Moscou ne signifie pas nécessairement que Pékin va exprimer un support automatique et sans réserve aux activités russes en Ukraine. Les contorsions diplomatiques auxquelles les porte-parole du gouvernement chinois se livrent depuis une semaine semblent le confirmer. Le 24 février, la porte-parole du ministre des Affaires étrangères chinois, Hua Chunying, a refusé de qualifier les actions russes en Ukraine d’invasion en disant que « there is a complex historical background and context on this [Ukraine] issue. The current situation is the result of the interplay of various factors » (Ministry of Foreign Affairs of the PRC, 2022a). Elle a tenté ensuite de détourner l’attention de la conférence de presse vers les États-Unis en spécifiant qu’ils n’ont pas de légitimité à donner des leçons quant au respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale d’États alors qu’eux même ont envahi de nombreux pays au prétexte de « democracy or human rights or simply a test tube of laundry powder or even fake news » et que « China has no interest in the friend-or-foe dichotomous Cold War thinking » (Ministry of Foreign Affairs of the PRC, 2022a).

Ce refus de Pékin de condamner l’invasion a été interprété par la plupart des gouvernements étrangers et médias internationaux comme un signe de support pour les actions russes en Ukraine, voire comme une façon d’assurer à Poutine que la Chine pourrait l’aider à faire face aux sanctions imposées par les pays occidentaux (Feigenbaum, 2022). En effet, avant que l’accès aux médias russes ne soit coupé aux internautes avec les adresses IP étrangères, on pouvait y trouver des articles détaillant comment la Chine pourrait exploiter les sanctions pour combler ses lacunes technologiques: le système de transfert interbancaire SWIFT pourrait être remplacé par son équivalent chinois, Cross-Border Interbank Payment System (CIPS), de même pour les semi-conducteurs et composants technologiques américains. Mais toutes les entreprises qui aident la Russie à contourner ces interdits seraient frappées à leur tour de lourdes amendes et sanctions, un scénario que les grandes compagnies chinoises ne peuvent pas ignorer étant donné leur dépendance au marché globalisé. Ainsi, selon les médias ukrainiens, les géants de la tech chinois Lenovo et TikTok auraient déjà pris la décision de quitter le marché russe (Derkatchenko, 2022), bien que cette information n’ait pas été officiellement confirmée par les compagnies en question. Ces considérations semblent pousser la Chine à modifier sa communication, désormais focalisée sur les efforts chinois à négocier un cessez-le-feu et à promouvoir la désescalade du conflit (Ministry of Foreign Affairs of the PRC, 2022b).

3.2. La couverture médiatique de la guerre en Chine

Les rapports des médias chinois sur ce qui se passe en Ukraine reflètent la position officielle de Pékin et évitent d’utiliser les termes « guerre » ou « invasion » dans leur description des événements, leur préférant l’expression ambiguë de « situation » (qushi 局势). Quant aux médias sociaux, la situation y est plus intéressante et dans un sens, plus révélatrice. Un nouvel hashtag (wuxin gongzuo 乌心工作) est apparu dès le 24 février pour désigner l’inquiétude éprouvée par les internautes chinois au sujet de la situation en Ukraine. Il s’agit d’un jeu de mots (wuxin gongzuo 无心工作 ou « ne pas être d’humeur à travailler ») signifiant que la personne est tellement préoccupée par ce qui se passe en Ukraine qu’elle ne parvient pas à se focaliser sur le travail en cours. Beaucoup d’internautes chinois expriment leur souhait que la guerre se termine vite et que la population civile soit épargnée, même si d’autres proclament leur appui en faveur des militaires russes, estimant que la guerre est le résultat de la politique pro-américaine de Kiev (Koetse, 2022a). Toutefois, la plupart des messages sur Weibo concerne le sort des citoyens chinois — étudiants et entrepreneurs —, coincés en Ukraine. Les médias officiels ont d’ailleurs publié des vidéos et articles consacrés à la croissance du sentiment antichinois à Kiev à la suite de la « diffusion par les médias ukrainiens de fake news sur le support de l’invasion russe par Pékin » (Koetse, 2022b). Ces publications ont suscité d’intenses débats sur Weibo qui n’ont pas tardé à prendre une dimension nationaliste. L’abstention de la Chine lors du vote au Conseil de la sécurité de l’ONU sur la résolution condamnant l’agression russe contre l’Ukraine a ainsi été interprétée non pas comme un signe de la complicité tacite, mais comme un penchant naturel de la Chine vers la neutralité et la résolution de conflits par les moyens de négociations.

L’abondance de réactions en ligne contraste fort avec la couverture médiatique officielle, qui continue à être relativement limitée. La page sur Weibo dédiée à la guerre, qui publie de nombreuses nouvelles sur la situation en Ukraine, a été vue le 24 février par presque 2,7 milliards d’internautes chinois, et bien que depuis le nombre de visites ait baissé, la page a enregistré malgré tout presque 500 millions de visites le 3 mars (Weibo, 2022). La préoccupation des Chinois envers le conflit en Ukraine n’est pas surprenante, en revanche, le fait que les organes de la censure aient autorisé toutes ces discussions à fleurir et les opinions divergentes (y compris vis-à-vis de la version officielle des événements) à s’exprimer est tout à fait singulier. La Chine semble vouloir se distancier de Moscou, y compris sur le plan médiatique, pour ne pas se laisser entrainer dans la guerre en Ukraine.

Conclusion

L’invasion de l’Ukraine déclenchée par la Russie le 24 février semble avoir surpris jusqu’au gouvernement ukrainien lui-même, malgré les avertissements répétés de Washington. Le président Poutine a justifié le recours aux armes par la défense de la minorité russophone du Donbass et les craintes d’une adhésion à l’OTAN souhaitée par l’Ukraine. Dans les deux cas, il semble qu’il ne s’agisse que de prétextes puisque les républiques sécessionnistes du Donbass n’étaient guère menacées, que l’invasion russe semble orientée vers la chute du gouvernement ukrainien, et que l’admission de l’Ukraine au sein de l’OTAN n’était guère envisagée par la plupart des membres actuels de l’alliance.

Au-delà des motivations de la Russie, la mobilisation des Occidentaux et du Japon se traduit par de lourdes sanctions économiques—dont la durée demeure à évaluer—et un isolement politique majeur de Moscou. Si ces sanctions et cet isolement devaient perdurer, ils poseraient la question du soutien de la Chine envers Moscou : Pékin soutiendrait-il a Russie, sachant qu’à court terme la Chine n’affiche qu’un appui très réservé ? La Chine ne souhaite pas faire les frais de l’aventurisme militaire de la Russie, sans que son soutien économique envers la Russie ne soit remis en cause. Comme le souligne Valérie Niquet, « la Chine aime la Russie, mais une Russie affaiblie, en situation de demandeur » (Niquet, 2022), situation que viendrait renforcer l’isolement politique dans laquelle la Russie s’est placée.

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[1] Nous avons retenu l’orthographe russe parce qu’elle est plus largement employée chez les Occidentaux. Les Ukrainiens écrivent Kyiv.