Jean-Marc Segoun1
1 Doctorant en Diplomatie et Relations Internationales à l’École des Hautes Études Internationales et Politiques (HEIP) Paris.
Vol 3, n 3, 2017
À propos de l’auteur
Doctorant en Diplomatie et Relation Internationale à l’École des Hautes Études Internationales et Politiques (HEIP) Paris, Jean-Marc Segoun est également chercheur en gestion des conflits et paix au Centre d’Études Diplomatiques et Stratégiques de Paris (CEDS).
Résumé : Les États postcoloniaux ouest-africains ont été pour la plupart construits essentiellement sur des bases culturelles. Ces configurations ont favorisé une cartographie ethnique du champ politique actuel. Ce processus d’ethnicisassions a permis aux entrepreneurs politiques de développer de nouvelles stratégies et ingénieries de mobilisations identitaires transfrontalières pour l’accès ou la privatisation de l’État. À cet effet, les géographies des rébellions au cours des guerres civiles au Libéria et en Côte d’Ivoire sont des illustrations des rôles ambivalents que peuvent avoir les frontières ouest-africaines. D’abord, comme lieux de conquêtes du pouvoir et ensuite, comme des espaces matériels fragiles de souveraineté politique. Ainsi, cet article essaie de comprendre les déterminismes des mobilisations des identités transfrontalières au service du marketing politique et des conflits armés dans ces deux pays.
Summary: The West African post-colonial states have for the most part been constructed on cultural bases. These configurations have favored an ethnic cartography of the current political field. This process of ethnicisation has enabled political entrepreneurs to develop new strategies and engineering of cross-border identity mobilization for the access or privatization of the State. To this end, the geographies of the rebellions during the civil wars in Liberia and Côte d’Ivoire are illustrations of the ambivalent roles of the West African borders. First, as places of conquest of power and then as fragile material spaces of political sovereignty. This article tries to understand the determinisms of the mobilization of cross-border identities in the service of political marketing and armed conflicts in these two countries.
Mots-clés: Afrique- ouest, identités, transfrontalières, État.
Keywords: West – Africa, cross-border, identities, State.
Introduction
En Afrique de l’ouest, la problématique des identités transfrontalières est une réalité sociale qui a précédé la construction de l’État postcolonial. Ces identités transfrontalières se sont toujours exprimées entre des peuples de différents espaces géographiques à travers des pratiques culturelles similaires. Les frontières héritées de la colonisation et la construction des nouveaux États postcoloniaux ont été des changements sociaux brusques qui fragiliseront des dynamiques interculturelles entretenues et conservées entre des peuples. Ainsi, deux thèses majeures s’affrontent sur l’origine et les rôles des frontières ouest-africaines.
D’une part, prévaut l’idée selon laquelle les frontières africaines sont arbitraires et donc construites à des fins coloniales dans le but de séparer les États africains en micro-États. Cette thèse de la balkanisation du continent nie l’homogénéité linguistique, identitaire et culturelle avant la colonisation. L’autre thèse postule pour l’argument selon lequel, les frontières ont permis une dynamique de solidarité socioculturelle qui s’est développée par le bas entre des peuples transfrontaliers.
Une dynamique qui favorise une réelle intégration régionale. Le concept de frontière n’avait de sens que dans les rapports qu’elle entretenait avec les autres formes de différence, de discrimination sociale, juridictionnelle et culturelle, les formes de contact et d’imbrication dans des espaces géographiques (Mbembe, 2005). Ainsi, le concept de frontière n’est toujours pas été associé à l’existence d’un État au sens juridique du terme. À cet effet, il émerge souvent au sein des camps de réfugiés de nouvelles figures de souverainetés différentes des systèmes juridiques des pays hôtes. Tout en servant de lieux de replis et de conspirations politiques des rébellions, les camps de réfugiés deviennent souvent des nations imaginaires et ainsi, émergent de nouvelles formes de frontières. Au sein de celles-ci, se construisent de nouvelles formes de sociabilité, des idéologies, des codes et des habitudes qui se transmettent et s’entretiennent entre acteurs.
La frontière est aussi une imbrication d’espaces multiples qui se réinventent, s’ajustent, se réduisent, face aux guerres et conquêtes et aux dynamiques migratoires (Koytoff, 1987). La Côte d’Ivoire et le Libéria, pays frontaliers ayant des identités transfrontalières communes, n’ont pas écharpé pas à des formes de violences généralisées transformées en guerres civiles. Au cours de celles-ci, des identités transfrontalières ont été mobilisées et notre réflexion se charge de comprendre les déterminismes de ces mobilisations.
Il s’agira pour nous d’identifier en quoi les identités transfrontalières manipulées à des fins politiciennes, peuvent être des sources d’instabilités en Afrique de l’ouest dans un premier mouvement de notre réflexion. Puis, dans un second moment, comprendre en quoi la patrimonialisation de l’État comme un espace privatisé constitue un processus de construction identitaire circonstanciel qui sape la cohésion sociale.
Les effets pervers des identités transfrontalières au service du marketing politique comme facteurs de désintégration régionale dans l’espace Ouest-Africain
Porter une réflexion sur les identités transfrontalières nécessite indispensablement une analyse historique sur l’évolution des frontières dans l’espace ouest africain. La configuration sociologique des pays de l’Afrique de l’Ouest est marquée par des changements sociaux divers. L’Afrique contemporaine est le fruit d’un ensemble d’interactions entre elle-même et le monde occidental au cours de plusieurs siècles (Médard, 1983).
Le concept de frontière connaît une évolution en Afrique de l’Ouest et est influencé par des mutations socio-politiques et économiques. Catherine Coquery-Vidrovitch, historienne française spécialiste de l’Afrique, fait une catégorisation des frontières en Afrique noire en trois grands moments à savoir : les frontières anciennes dites précoloniales, puis les frontières coloniales et enfin les nouvelles frontières (Coquery-Vidrovitch, 1999:36). Les frontières anciennes dites précoloniales n’avaient pas le même rôle que les frontières fixées par les occidentaux.
Ces frontières se matérialisent par des cours d’eau, des espaces et des forêts dont les rôles étaient de limiter le pouvoir d’un chef, des espaces précis et de créer des zones d’échanges, de rivalités. Elles créaient de nouvelles conquêtes entre les empires. Ainsi, à cette époque le concept de frontière était un espace de régression culturelle. Au fil du temps, on assiste au passage des frontières anciennes aux frontières coloniales. Cette mutation est due à l’arrivée des missionnaires occidentaux voulant délimiter leur champ d’exercice. Le projet colonial a eu des influences sur les mentalités et les systèmes locaux de gestion. La colonisation a permis de construire le mode de peuplement, le mode de vie en collectivité, les idéologies et les valeurs, les institutions et la fabrication des élites (Médard, 1983).
L’accession aux indépendances des pays ouest africains en 1960 marque la naissance des nouveaux États et des nouvelles frontières héritées de la colonisation. Les dirigeants marquent leur volonté de créer une unité nationale afin de mobiliser les énergies des populations au sein d’un parti unique pour amorcer une dynamique de développement. Cette idéologie politique présage la naissance de l’État nation en Afrique. Cette dynamique d’unité nationale se concrétise au cours de la conférence de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) de 1963 qui portait sur le respect des frontières héritées de la colonisation.
Ainsi, le principe de l’intangibilité des frontières en vue d’éviter les conflits armés a été le projet politique qui marque la première décennie des indépendances. On assiste alors à la création des États nations construits sur des partis uniques niant le caractère pluriel des composantes ethniques et des identités transfrontalières. L’Afrique faisant partie intégrante du système monde, connaît des changements sociaux suite à la chute du mur de Berlin et de l’arrivée de la démocratie.
Au fil du temps, la notion de frontière se réinvente face aux exigences de la modernité pour la compétition des marchés et la montée de l’insécurité. À cet effet, nous partageons l’approche conceptuelle du professeur Amilhat-Szary sur la notion de frontière mobile. Celle-ci ne se résume plus seulement à la localisation des aires de souverainetés mais peut être multipliée dans l’espace en fonction des politiques des États comme un rapport dynamique à la norme, dans les processus de désintégration ou d’intégration, dans les modes d’identification, les sociabilités, de production et de contestation (Amilhat-Szary et Giraut, 2011). Les identités transfrontalières construites sur des pratiques culturelles développent des liens de sociabilité dans la définition des rapports sociaux. Alors l’identité est un indicateur de reconnaissance sociale autour duquel gravitent les rapports sociaux.
Selon Tajfet et Turner, la théorie de l’identité sociale s’inscrit dans la perspective de l’étude des conflits intergroupes (Autin, 2010). Elle postule que la seule catégorisation entre deux groupes distincts entraîne la discrimination à l’encontre de l’exogroupe dans le but de différencier son groupe. L’enjeu de la différentiation est une identité collective positive, celle-ci résultant d’une comparaison intergroupe favorable à l’endogroupe.
L’identité et son affirmation sont un phénomène naturel et donc inhérent à la structuration des rapports humains (David, 2000). Elle joue le rôle de conciliateur de plusieurs membres d’une communauté autour des valeurs partagées ou des situations collectives mêmes circonstancielles du fait que le destin collectif peut en dépendre.
Au-delà des filiations biologiques existent des formes de parenté non biologiques « mais structurées et scellées par des transactions et conventions sociales telles que l’alliance, le pacte, le serment, la confraternité, l’amitié, les parentés et relations à plaisanteries, les franchises inter-ethniques et inter-villageoises » (Akindès, 2003:403). Les processus de construction de l’identité, de reconnaissance et d’appartenance sociale, d’établissement des liens sociaux, relèvent de l’ordre du culturel naturalisé, de l’ordre de l’habitus selon les termes de Bourdieu.
Ainsi, c’est la mauvaise gestion des diversités culturelles intra-étatiques et inter-étatiques plutôt que leur affirmation elle-même, qui a été en partie la cause des conflits armés et des implosions étatiques. Cela s’est traduit par la guerre de sécession du Biafra au Nigéria, de celle de la Casamance au Sénégal, sans compter les guerres civiles à caractère ethnique en Sierra Léone, au Libéria et la rébellion touarègue au Mali et au Niger.
L’historien Yao Kouassi critique le discours politique des pères des indépendances africaines sur l’unité nationale. Il postule pour l’argument selon lequel l’affirmation des spécificités culturelles et historiques ou l’expression de revendication à caractère politique d’une nation dans un État est férocement combattue au nom de l’unité nationale, de l’individu dans la république et du principe de l’intangibilité des frontières coloniales (Kouassi, 2006). Le conflit armé qu’a traversé le Libéria est qualifié de guerre sans frontières, du fait que les pays limitrophes comme la Guinée, la Sierra Leone, La Côte d’Ivoire aient été des bases de replis, de conspirations et de formations des insurgés. « Leurs formes s’expliquent pour beaucoup par les liens tissés entre des individus qui furent un temps réfugiés, dirigeants politiques en exil, mutins, exclus du système scolaire et illettrés, et trouvèrent dans un pays voisin du leur le soutien politique et l’appui militaire pour créer et sustenter des mouvements armés afin de mener leurs guerres à partir des zones frontalières » (Marchal et. al., 2002 : 8). Dans le contexte libérien, la perversité des identités transfrontalières a donné un caractère régional à la guerre civile. En 1989, le groupe rebelle NPFL (National Patriotic Front of Liberia) composé en majorité du groupe ethnique gio dont le leader est Charles Taylor, lance une offensive contre les forces gouvernementales composées du groupe ethnique khran de Samuel Doe.
Le conflit armé libérien s’enlise et gagne une dimension régionale dans l’ouest de la Côte d’Ivoire et par le jeu d’alliance et l’interpénétration ethnique.
En effet, les gio du Libéria favorables à Charles Taylor et les yacouba de Côte d’Ivoire parlent la même langue. Les jeunes khran libériens favorables à Samuel Doe et les guéré de l’ouest de la Côte d’Ivoire parlent la même langue. Ainsi, un jeu d’alliance s’est construit dans l’ouest de la Côte d’Ivoire et le conflit gagne une dimension ethnique et transfrontalière. Après la mort de Samuel Doe, les krahn se sont regroupés au sein de l’ULIMO (United Liberation Movement of Liberia for Democracy) pour combattre Taylor.
Le NPFL majoritairement gio et l’ULIMO essentiellement du groupe ethnique krahn se sont ainsi affrontés pendant sept ans sans qu’il y ait de vainqueur. Après les élections, les jeunes krahn ont massivement quitté le Liberia pour se réfugier dans la région des guéré dans l’ouest de la Côte d’Ivoire de peur d’être victimes de représailles du pouvoir de Charles Taylor.
Suite à la mort du général ivoirien Robert Gueï le 19 septembre 2002, les jeunes yacouba de Côte d’Ivoire ont formé le MPIGO (Mouvement Populaire ivoirien du Grand Ouest) pour le venger ils ont été épaulés par les gio. Les krahn, eux sont alors allés épauler les forces loyalistes ivoiriennes pour stopper l’évolution du MPIGO vers la région guéré ivoirienne.
Partant de l’observation des conflits armés ivoiriens et libériens, on en déduit des effets de contagion, des imbrications et des jeux d’alliances ethniques de circonstance qui dépassent l’espace géographique, l’espace frontalier. Des alliances ethniques mobiles entre deux guerres civiles de différentes configurations.
Au regard des faits, nous déduisons que la perception de l’État comme espace d’opportunités politiques, créé de la compétition, la mise en oeuvre de manoeuvres qui unissent des individus autour d’un projet collectif, une sorte de communauté de destin. Ainsi, le projet d’accès ou de privatisation de l’État apparaît comme un processus de construction d’identités politiques circonstancielles. Ce processus de construction identitaire, transgresse les appartenances religieuses, ethniques, et les identités culturelles transfrontalières.
La représentation psychologique de l’État dans l’univers collectif comme un processus de construction identitaire qui sape la cohésion sociale durable
Notre analyse dans cette partie conforte l’approche conceptuelle de J.-F. Bayart sur la politique du ventre en Afrique particulièrement sur la compétition et la lutte de certaines classes pour la conservation et l’accumulation de biens publics à leurs profits. L’État post-colonial a été pris en otage dès sa proclamation.
Ainsi, les entrepreneurs politiques mobilisés pour l’accès ou la privatisation du pouvoir sont à la recherche de nouvelles opportunités économiques et commodités sociales. Celle-ci, est démontrée par la théorie du choix rationnel ou l’individualisme méthodologique dont l’objectif est d’étudier les phénomènes sociaux comme des produits émergents, de la résultante d’action individuelle. Cette théorie nous permet de comprendre les variables motivatrices pour lesquelles les individus s’adonnent aux hostilités conflictuelles. La théorie du choix rationnel fait ressortir la notion de coût d’opportunité qui permet d’orienter le positionnement décisionnel d’un acteur social.
La théorie du choix rationnel repose, selon Boudon, sur trois postulats de base « postulat de l’individualisme, postulat de compréhension et le postulat de rationalité) à partir desquels se déclinent cinq restrictifs (postulat de conséquentialisme, postulat de l’égoïsme, postulat du calcul coût bénéfice, postulat de puissance, et postulat de l’intérêt de classe » (Boudon, 2002:9).
À la faillite économique, s’ajoute une faillite sécuritaire. La création des forces armées post-coloniales pour symboliser la souveraineté des États a servi à réprimer afin de mieux assurer la longévité des règnes contestés (Kouassi, 2006). Certains auteurs qualifient ce phénomène de privatisation et de patrimonialisation de l’État (Akindès, 2013). À observer le rapport des élites à l’État et ceux du citoyen lambda à l’État on remarque une sacralisation de l’autorité inégalable. L’État reste en Afrique le lieu exceptionnel de concentration d’extrêmes pouvoirs financiers et politiques et offre une élasticité d’avantages qui fascine l’imaginaire collectif. Notons que ce véritable processus de privatisation de l’État implique divers acteurs tant du haut que du bas.
En ce qui concerne les acteurs politiques du haut (Tarrow, 1989), et les grands opérateurs économiques, la notion de structure d’opportunité en politique (Doug, 1982) nous permet de mieux appréhender l’évolution des transhumances politiques. À cela s’ajoutent, les tripatouillages constitutionnels et enfin le parrainage ou le soutien des multinationales dans les économies de guerre, les ingénieries du massacre humain et de développement des violences armées.
La longévité de l’État permet à certains du bas citoyen lambda de garantir souvent des privilèges obtenus de manière illégale par des liens de parenté, des formes de participation politique dans des dispositifs locaux ou nationaux. Des rapports de clientélisme se rationalisent comme une culture politique tout en animant les dynamiques relationnels au sein des appareils politiques et gouvernementaux et souvent des sociétés civiles. Nous observons ici deux catégories sociales à savoir élitiste et populaire, qui se fusionnent de manière circonstancielle et dont pour qui, l’accès ou la pérennité du pouvoir doit être une réalité.
Ici, nous adoptons une approche constructiviste de l’identité qui transgresse la filiation ethnique, les appartenances religieuses et les catégories sociales. La cartographie des partis politiques au Libéria et en Côte d’Ivoire témoigne du fait que chaque groupe ethnique majoritaire dans une région appartient à un même parti politique dont le leader lui-même est originaire de la région. En Côte d’Ivoire la gouvernance de Félix Houphouët Boigny, (1960 à 1994) est marquée par une politique ethnocentrique et une privatisation de l’État sur plus de trois décennies. Les partis politiques ont été construits sur des bases ethniques et sur des appartenances religieuses. Au Libéria, les différents coups d’États successifs opposeront violemment les groupes ethniques majoritaires des chefs rebelles.
Ainsi, on assiste à une ethnicisation radicale du champ politique dans ces deux pays. La privatisation de l’État par un groupe ethnique ou un parti politique ressortissant d’une région est un fait qui marque la vie politique ivoirienne ainsi que celle du Libéria donnant lieu à l’exclusion socio-politique, et économique. Ces manœuvres politiques sont sources de désintégration sociale et de conflits armés.
Conclusion
La résurgence des guerres civiles en Côte d’Ivoire et au Libéria reste des cas d’école en matière de maintien et de consolidation de la paix. Cela s’explique par le fait que ces deux pays témoignent de par leurs expériences sécuritaires que le processus de construction d’une paix durable reste un défi très complexe pour les sociétés fragiles en proie à des violences politiques contestataires. Nous retiendrons que l’une des solutions efficaces aux conflits identitaires transfrontaliers et nationaux, reste la production d’acteur pro-actif, et cette capacité d’être, au sens d’Amartya Sen qui reste confisqué par certains entrepreneurs politiques. L’épineuse problématique au regard de cette réflexion reste la volonté politique pour impulser une transformation sociétale. À savoir, le passage d’une société du conformisme, injuste, qui garantit les acquis illégaux d’une frange ; à une société caractérisée par les valeurs de la démocratie libérale.
Notre étude a démontré que l’Afrique reste confrontée aux formations continuelles de foyers de tensions des conflits armés. En effet, l’Afrique, qui constitue 15% de la population mondiale, produit aujourd’hui 25% des réfugiés au monde. Le plus grand camp de réfugiés au monde s’y trouve dans la ville de Dadaab au Kenya. Les facteurs qui favorisent ces conflits armés sont multiformes et varient d’une région à une autre de l’Afrique. Nous pouvons en citer : la mauvaise gouvernance, les inégalités liées au partage des richesses nationales. À cela s’ajoutent, les problèmes d’accès aux ressources naturelles, les problèmes identitaires et les dénis de reconnaissances, l’exclusion socio-économique.
Le caractère conflictogène des identités transfrontalières émane essentiellement de la manipulation et la mobilisation des diversités culturelles comme raccourcis politico-économiques. Ainsi, les recours aux identités dans les compétitions électorales, ou dans des violences contestataires sont récurrents et constituent un raccourci stratégique pour les entrepreneurs politiques. Partant de constat, cet article a essayé de porter une réflexion sur les effets pervers des identités transfrontalières au service du marketing politique comme facteurs de désintégrations régionales dans l’espace ouest-africain. Puis à aborder la question de la représentation psychologique de l’État dans l’univers collectif comme un processus de construction d’identité qui sape la cohésion sociale.
Biblographie
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