Quelles trajectoires pour la Banque asiatique d’investissements dans les infrastructures (BAII)? Analyse prospective sur la diplomatie économique de la Chine

Gauthier Mouton1

Doctorant en science politique, Université du Québec à Montréal.
Co-coordonnateur de l’Observatoire de l’Asie de l’Est
gauthier.mouton@orange.fr 

Vol 3, n 3, 2017


À propos de l’auteur

Diplômé d’un Master en Relations Internationales de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Gauthier Mouton est actuellement doctorant en sciences politique à l’Université du Québec à Montréal et Co-coordonnateur de l’Observatoire de l’Asie de l’Est. Sa thèse de doctorat porte sur les enjeux de sécurité énergétique en Chine.


Résumé: Le lancement, en 2015 à Pékin, de la Banque asiatique d’investissements dans les infrastructures (BAII) a suscité autant de scepticisme, surtout en Amérique du Nord, que d’enthousiasme, en particulier dans les pays d’Asie du Sud-Est. La BAII, qui comptera bientôt 70 États membres, dessine les contours de la future diplomatie économique de la Chine en ce début du 21e siècle. L’article présente des hypothèses sur les principales ambitions de cette banque multilatérale.

Summary: The launching of the Asian Investment Infrastructure Bank (AIIB) in Beijing in 2015, was welcomed both with scepticism, especially in North America, and enthusiasm, particularly in Southeast Asia countries. AIIB, which will soon comprise 70 member states, drafts the outlines of China’s future economic diplomacy at the beginning of the 21st century. This article presents a number assumptions about the main ambitions of this multilateral bank.

Mots-clés: BAII, Chine, OBOR, stratégie, diplomatie économique.

Keywords: AIIB, China, OBOR, strategy, economic diplomacy.


Introduction 

Le 11 décembre 2016 a marqué le 15ème anniversaire de l’entrée de la République populaire de Chine (RPC) à l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Si la question de savoir s’il faut désormais considérer la Chine comme une économie de marché a polarisé les débats[1], cette célébration vient rappeler – si toutefois il était nécessaire – que le pays s’inscrit pleinement et sans aucun doute de manière pérenne dans la mondialisation. Restée à l’écart du « miracle asiatique » (Banque mondiale, 1993), la Chine a connu une phase de croissance spectaculaire depuis le début des années 2000 et les échanges commerciaux avec ses voisins se sont intensifiés (Ferdinand, 2016 : 942). À Pékin, le développement économique apparaît d’ailleurs comme un leitmotiv du discours politique officiel. Le 23 septembre 2009, à l’occasion de l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies (ONU), Hu Jintao déclare: « Une Chine plus développée apportera une plus grande contribution au monde, et [lui] offrira plus d’opportunités » (Courmont, Lincot, 2014 : 11). La création de la Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures (BAII, en chinois mandarin 亚洲基础设施投资银行) s’inscrit dans cette quête d’influence globale.

Créée le 24 octobre 2014 à Pékin, la BAII est opérationnelle depuis le mois de décembre 2015 et compte actuellement 57 États actionnaires – 16 pays européens, dont 14 membres de l’Union Européenne (UE), et les nations qui forment avec la Chine les BRICS (Brésil, Russie, Inde et Afrique du Sud). Pour des raisons politiques, les États-Unis et le Japon ne sont pas, pour le moment, devenus actionnaires de la BAII. Le Canada, quant à lui, s’est porté candidat en mars 2017, aux côtés de 12 autres pays, pour intégrer l’institution, portant ainsi le nombre d’États membres à 70 (BAII, 2017a). La création officielle de cette institution a eu lieu le 29 juin 2015 dans la capitale chinoise, où des représentants de la Chine et de 56 États ont signé le Memorandum of Understanding for the creation of the Asian Infrastructure Investment Bank. La mission de la banque est précisée en deux articles : 1) accélérer le développement économique, améliorer les infrastructures et promouvoir la connexion par les infrastructures ; 2) favoriser la coopération régionale et les partenariats en travaillant notamment avec les autres institutions bilatérales et multilatérales (Chin, 2016 : 11). Initialement prévu à 50 milliards de dollars américains, le capital de la BAII a été doublé en juin 2014 ; ces 100 milliards doivent être mis en perspective avec le montant des capitaux de la Banque Mondiale et de la Banque asiatique de développement (BAD), respectivement de 223 et 160 milliards de dollars américains (au 31 décembre 2016).

L’une des principales difficultés méthodologiques qui s’est posée lors du processus de recherche tient au caractère très récent de la BAII. En effet, la littérature scientifique à ce sujet demeure fragmentée en comparaison à d’autres institutions multilatérales telles que la Banque mondiale, le Fonds monétaire international (FMI) ou encore la BAD. Énième organisation inter-gouvernementale ou véritable innovation institutionnelle ? Le lancement de la BAII a fait couler beaucoup d’encre et l’essentiel des analyses convergent vers l’assomption suivante : cette initiative chinoise met en lumière les rivalités sino-américaines, élément structurant du système international et potentiel facteur de déséquilibres entre ces deux grandes puissances.

Toutefois, l’émergence d’un nouvel ordre mondial (qu’il soit financier ou non) ne correspond jamais à une transformation soudaine. Au contraire, c’est un phénomène politique qui s’inscrit dans le temps long (Wang H., 2015). Si certains auteurs voient dans la création de la BAII la naissance d’un nouvel ordre économique mondial (Ajay, 2015 ; Zhongkai, 2015), cette banque symbolise pour d’autres le déclin de la puissance américaine et la montée de la Chine (Merry, 2015). Aux États-Unis, l’initiative chinoise est surtout perçue comme l’échec de Washington de n’avoir pas su anticiper, ou du moins accorder suffisamment d’attention à ce projet. À cet égard, les propos de l’ancien secrétaire du Trésor américain, Larry Sommers, sont assez représentatifs de cet état d’esprit. Selon lui, l’établissement de la BAII « may be remembered as the moment the United States lost its role as the underwriter of the global economic system » (Sheng, Geng, 2015).

Si l’objectif de ce travail de recherche consiste à démontrer que la BAII représente la pierre angulaire de la diplomatie économique[2] de la Chine en ce début du 21e siècle, il s’agit surtout de soulever plusieurs hypothèses quant aux trajectoires que dessinent cette banque multilatérale et comment celle-ci peut servir les intérêts chinois dans une reconfiguration du système financier international. Comme il l’a été mentionné précédemment par plusieurs auteurs, la BAII sert la volonté de la Chine de faire contrepoids aux institutions existantes dans lesquelles l’influence des États-Unis prédomine (hypothèse n°1). Dans la littérature académique, en particulier américaine, le cas de la BAII se voit généralement analysé au prisme de la gouvernance mondiale, un enjeu qui se résume souvent de manière trop rigide par l’opposition entre « consensus de Washington » et « consensus de Pékin ». En outre, la banque multilatérale s’inscrit en complémentarité avec le projet des nouvelles routes de la soie (correspondant en anglais à
la formule « One belt, one road » (OBOR), «une ceinture, une route» , ou en mandarin « yi dai yi lu » 一带一路). La BAII constitue par conséquent le bras financier de ce chantier pharaonique (hypothèse n°2). Les premiers projets officiels de la BAII offrent déjà des pistes de réflexion préliminaires sur ce à quoi pourraient ressembler les réalisations concrètes de la banque dans les années à venir. En misant sur le secteur des infrastructures, la Chine ambitionne de réussir là où d’autres expériences d’intégration économique ont échoué. Elle veut participer, par la voie du commerce, à l’apaisement des tensions dans sa périphérie, notamment en Asie du Sud-Est (hypothèse n°3). Enfin, l’un des objectifs associés à la BAII est qu’elle serve de levier à l’internationalisation du yuan, la monnaie chinoise (hypothèse n°4).

1) Hypothèse n°1 : la BAII vise à concurrencer la Banque mondiale (et la Banque asiatique de développement).

Une partie de la littérature académique établit un parallèle entre la Banque asiatique d’investissements dans les infrastructures et ses homologues américaines (Banque Mondiale et FMI), en soulignant notamment que les autorités chinoises envisagent une remise en cause du leadership américain voire une transition vers un monde libéré des cadres réglementaires hérités des Accords de Bretton Woods de 1944. Ainsi, les théories relatives à l’hégémonie sont souvent évoquées, au sens gramscien du terme, c’est-à-dire qui ne relève pas d’une domination pure et simple, d’une coercition politique exercée par un État, mais signifie plutôt l’exercice d’un leadership intellectuel et moral, une domination non ressentie comme telle par ceux qui la subissent[3]. Robert Cox estime que l’anarchie des relations internationales cache un ordre hégémonique, suite à la capacité d’un État – en l’occurrence les États-Unis de nos jours – à
« proposer et à protéger un ordre mondial universel dans sa conception, c’est-à-dire compatible avec les intérêts des autres États » (Cox, 1983 : 168). Selon cette hypothèse, c’est précisément cette prétention à l’universalisme que la Chine voudrait faire sienne.

En réalité, il faut signaler une dimension sur laquelle la BAII se distingue nettement des institutions américaines et qui concerne le mode de gouvernance. La banque chinoise se structure selon 3 niveaux: les membres du personnel, les 12 membres du Comité des Directeurs[4]  et enfin le Comité des Gouverneurs (à chaque pays membre est assigné un gouverneur). L’une des particularités de la BAII tient au fait qu’aucun des comités n’est permanent. La question de savoir si une institution multilatérale devrait accueillir ou non un comité permanent (resident board) s’est déjà posée en 1944 et a fait l’objet d’intenses tractations (Steil, 2013). À cette époque, les pères fondateurs de la Banque Mondiale et du FMI s’opposaient farouchement: John Maynard Keynes défendait l’idée d’un comité non-permanent mais tout de même composé de haut-profils en charge de la stratégie de l’institution. Finalement, la position de Harry Dexter White l’emportera et les deux institutions seront dotées d’un comité exécutif permanent avalisant toutes les décisions (Callaghan, Hubbard, 2016 : 130).

Le lancement de la BAII a également été interprété comme une volonté de venir compléter les institutions financières déjà existantes en Asie, en particulier la Banque asiatique de développement, une institution où l’influence du Japon est – pour certains analystes – donnée pour acquise. Or, si les rivalités entre la Chine et son voisin japonais se résument d’ordinaire par la formule « hot economics, cold politics », il faut rappeler que dans les faits la BAD travaille déjà avec la Chine sur des projets. La stratégie de la BAII se base d’ailleurs sur des partenariats avec d’autres institutions (Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement, Nouvelle Banque de Développement, etc.). La rencontre le 13 décembre 2016 à Manille, au siège de la Banque asiatique de développement, entre son président Takehiko Nakao et le président de la BAII, Liqun Jin, illustre une avancée supplémentaire vers la réalisation de cet objectif de collaboration (BAD, 2016). Un accord de partenariat a enfin été signé entre la BAII et la Banque mondiale au mois d’avril de cette année (BAII, 2017b). C’est dire à quel point la concurrence annoncée entre la BAII et les autres institutions relève davantage de la représentation, du symbole, que de la réalité internationale.

2) Hypothèse n°2 : la BAII constitue le principal bras financier du projet OBOR.

Lancé en 2014, le projet des nouvelles routes de la soie (糹糹绸之路經濟帶) doit être appréhendé comme partie intégrante d’une « grand strategy » (Beeson, Li, 2016 : 496) de la Chine dont l’objectif affiché est de redistribuer les cartes à l’échelle internationale, c’est-à-dire modifier les alliances militaires et les rapports géopolitiques. L’initiative de Xi Jinping de réhabiliter ces anciens itinéraires commerciaux marque une volonté d’ouverture en direction des pays européens en même temps qu’un effort pour circonscrire la pénétration économique et militaire des États-Unis en Asie. Un fond de 40 milliards de dollars américains (Silk Road Project Fund) a été mis sur pied afin de financer ce projet pharaonique qui se décline en deux volets : un trajet terrestre (Silk Road Economic Belt) et une voie maritime (Maritime Road Economic Belt). La route terrestre traverse l’Asie centrale, le Nord de l’Iran, traverse la Bulgarie, la Roumanie et l’Ukraine puis relie Moscou à Duisbourg en Allemagne (le plus grand port intérieur du monde). La route maritime, elle, traverse les mers de Chine orientale et méridionale jusqu’en Indonésie, puis remonte au nord en direction de la Birmanie, contourne la corne de l’Afrique pour enfin franchir le canal de Suez, porte d’entrée de la Méditerranée. Ce réseau compte 27 villes-étapes et désigne, pour certains observateurs chinois, le prélude d’une ère eurasiatique (Chongyang Institute…, 2014). Lors du Forum de Bo’ao en mars 2015, Xi Jinping a exprimé l’espoir que le volume annuel des échanges entre la Chine et les pays de la « ceinture et route » « dépasse les 2 500 milliards de dollars [américains] dans une dizaine d’années » (Li, Guo, 2015).

Bien qu’ils soient indissociables l’un de l’autre, le projet OBOR et la BAII font l’objet d’interprétations divergentes selon que le point de vue exposé soit américain ou asiatique. Contrairement à une majorité d’auteurs chinois, les Américains analysent ces initiatives au prisme de la gouvernance globale. Les États-Unis ont sans doute perdu en crédibilité en refusant d’intégrer la BAII, et en dissuadant (sans succès) certains de ses alliés historiques (le Royaume-Uni par exemple) de se joindre à l’institution. Néanmoins, les travaux de chercheurs chinois ou asiatiques illustrent une certaine réserve quant à la faisabilité du projet OBOR. À l’inverse de leurs homologues occidentaux, les avis sont plus mesurés et nuancés. Par exemple, selon Wang Baozhu, l’un des scénarios optimistes de la route maritime serait qu’elle aboutisse à une intégration renforcée des économies d’Asie du Sud-Est (Wang B., 2015). De manière similaire, les nouvelles routes de la soie, soutenues par l’injection de capitaux par la BAII, permettraient de jeter une passerelle entre l’Europe et la Chine (Wang Y., 2015), où les entreprises européennes sont encore mal implantées.

Comparativement au tracé terrestre, c’est davantage le volet maritime du projet OBOR qui concentre les intérêts stratégiques pour la Chine. Considérant que plus de 80% des échanges commerciaux dans le monde s’effectuent par voie maritime, le développement de la logistique et des transports en Asie apparaît comme une priorité. En 2011, un plan pour la connectivité (ASEAN Master Plan for Connectivity ou AMPC) de 476,3 millions de dollars américains a été mis en place, sous les auspices de la Banque asiatique de développement, afin de financer les infrastructures nécessaires à relier plus rapidement et de manière plus sûre les nombreux ports régionaux (Arase, 2015). Les futurs fonds alloués à la route maritime du projet OBOR devraient compléter et renforcer la qualité et l’accessibilité des ports asiatiques, ces derniers figurent pour la plupart en tête des classements internationaux.

Dans la réalisation du projet des nouvelles de la soie, des points d’achoppement subsistent entre la puissance chinoise et ses voisins du Sud. La mise en service d’un train à grande vitesse reliant la province du Yunnan (Sud-Ouest de la Chine) aux principales villes du Vietnam et du Laos peine à se concrétiser. La même défiance s’applique sur le plan maritime car l’ambition de Pékin d’établir des points d’attache dans les ports de la région s’est vue adressée une fin de non-recevoir au Vietnam. Il est probable, en revanche, qu’une présence chinoise soit garantie sur la côte birmane, à Kyaukphyu, où un oléoduc financé par la China National Petroleum Company (CNPC) permet d’acheminer vers la Chine du pétrole déchargé par tanker dans le golfe du Bengale (Yacine, 2017). Singapour – fidèle à sa position singulière en Asie du Sud-Est –  est favorable à une coprésence de la flotte chinoise et américaine. Quoiqu’il en soit, difficile à l’heure actuelle d’imaginer en Asie du Sud-Est un scénario semblable à ce que la Chine a réalisé au Pakistan. Celle-ci a financé la construction et assure désormais la gestion du port de Gwadar, terminal du China-Pakistan Economic Corridor et principale artère de la ceinture terrestre du projet OBOR.

Le 14 et 15 mai 2017 s’est tenu à Pékin le Forum de « la Ceinture et la Route » pour la coopération internationale. L’allocution du président chinois visait, une fois n’est pas coutume, à rassurer ses partenaires en faisant la promotion d’une logique gagnant-gagnant (共贏共) afin d’établir une gouvernance mondiale aux bénéfices de tous. Comme Xi Jinping l’avait rappelé à Paris à l’occasion du 50ème anniversaire des relations diplomatiques franco-chinoises – « Le lion s’est éveillé mais c’est un lion pacifiste, aimable et civilisé » (« 中國這頭獅子已經醒了,但這是一隻和平的、可親的、文明的獅子 », Xi Jinping, 2014) –, la Chine voit dans OBOR un projet de civilisation dont l’un des objectifs serait de pacifier l’environnement régional en Asie.

3) Hypothèse n°3 : la Chine souhaite apaiser les tensions nationales et régionales par la voie du commerce.

La stratégie régionale de la Chine s’est historiquement construite sur un objectif d’apaisement et de relations de « bon voisinage, sécuritaire et prospère » (mulin, anlin, fulin), favorables au développement économique et à l’approfondissement de la coopération (Boulanger et al., 2008 : 105). Surtout, c’est l’exclusion des États-Unis, ou du moins la limitation de leur levier d’influence en Asie du Sud-Est et en Asie centrale, qui est visée par la Chine dans sa poursuite de l’institutionnalisation de la région. L’établissement de l’ASEAN +3[5] ou encore l’ouverture de l’Organisation de coopération de Shanghaï (OCS)[6] à de nouveaux membres illustre la tactique de Pékin. Ayant réussi à inclure dans la BAII des pays africains (l’Égypte et prochainement l’Afrique du Sud) ainsi que le Brésil, la Chine déploie une stratégie globale qui repose sur des partenariats Sud-Sud. Ce modèle se caractérise par une coopération économique plus ciblée et par un certain nombre de principes – appréciés et défendus par la Chine sur la scène internationale tels que: la non-ingérence dans la politique et les affaires intérieures de l’État partenaire, la promotion du respect et de l’égalité dans une relation dite « gagnant-gagnant », et enfin l’absence de conditions politiques préalables, notamment sur les droits de l’homme et la gouvernance (Deblock et al., 2016 : 30). Ayant assuré jusqu’ici le rôle de béquille ou de paravent à la puissance chinoise, les BRICS font l’objet d’une importance moindre sur la scène internationale, et ce malgré la création en 2015 de leur propre institution financière, la Nouvelle Banque de Développement. S’il est encore pertinent pour Pékin de s’allier à des puissances émergentes telles que le Brésil, notamment pour assurer l’établissement d’entreprises chinoises en Amérique latine, aujourd’hui la raison d’être des BRICS est remise en question.

La place accordée aux pays asiatiques dans la BAII met en lumière l’orientation régionaliste de l’institution. Leurs investissements cumulés s’élevant à 72 milliards de dollars américains (72,739.4 millions), les membres régionaux (asiatiques), représentent près de 80% du budget (91,972.8 millions) tandis que la Chine participe à hauteur d’un tiers du budget global (29,780.4 millions), ce qui correspond à 26,06% des droits de vote (chiffres officiels de la BAII au 10 février 2017). Les règles de gouvernance de la banque assurent également la prépondérance des pays asiatiques (ceux-ci doivent toujours détenir des quotes-parts équivalentes à au moins 75% du capital) et sur les 12 membres du comité des directeurs (Board of Directors), 7 représentent les pays de la région (Callaghan, Hubbard, 2016 : 129).

Les premiers projets approuvés par la BAII concernent des pays centrasiatiques, pour certains des États minés par la corruption et l’instabilité. En Chine, on craint que cette stratégie participe à accroître davantage la dette publique qui dépasse désormais 270% du produit intérieur brut (PIB). Comme le remarque l’agence de notation financière Fitch Ratings, « The lack of commercial imperatives behind Obor projects means that it is highly uncertain whether future project returns will be sufficient to fully cover repayments to Chinese creditors » (Hancock 2017). Au-delà des incertitudes entourant la rentabilité financière de la diplomatie économique de la Chine, le tropisme centrasiatique dont témoignent les premières réalisations de la BAII s’inscrit dans la continuité de la politique en direction de l’Ouest (西部大开发), lancée en 1999, en faveur du développement économique des provinces du Tibet et du Xinjiang (Lemoine, 2014 : 7). Cette politique d’envergure s’est matérialisée à travers des projets autoroutiers et ferroviaires qui traversent la région ouïghoure du Xinjiang et qui rapprochent physiquement cette région enclavée à la partie orientale de la Chine. Le processus d’arrimage de cette périphérie occidentale s’est faite grâce à la route qui rejoint Lanzhu (Gansu) à Urümqi, ouverte depuis le 26 décembre 2014, et sur laquelle rail et asphalte se confondent (Cariou, 2009 : 6); ou bien encore par la voie express de 213 km reliant Kashgar (Xinjiang) à Erkeshtam (Kirghizistan) et qui a coûté la bagatelle de 660 millions de dollars américains (Nazet, 2014).

L’un des premiers projets approuvés par la BAII, en juillet 2016, porte sur des infrastructures routières reliant la capitale tadjike, Douchanbé, à l’Ouzbékistan. Il est co-financé par la Banque Européenne de la Reconstruction et le Développement (BERD). Les autres projets officiellement lancés par la banque multilatérale sont implantés en Indonésie, en Birmanie, au Pakistan, au Bangladesh, dans le sultanat d’Oman et en Azerbaïdjan[7]. Les projets qui se trouvent actuellement au stade de proposition feront l’objet d’une coopération avec la Banque mondiale, la BERD et la Banque asiatique de développement. Les pays centrasiatiques (Kazakhstan) et du sous-continent indien (Bangladesh, Inde) représentent ainsi les principaux clients de ces transferts d’infrastructures, qui concernent en particulier le secteur de l’énergie. Pour la Chine, la BAII traduit la continuation de la politique par d’autres moyens, en l’occurrence des moyens économiques et financiers.

4) Hypothèse n°4 : la BAII va contribuer à l’internationalisation de la monnaie et des entreprises chinoises.

L’une des offensives chinoises marquantes de ces dernières années a eu lieu dans le secteur financier. Le 30 novembre 2016, le conseil d’administration du Fonds monétaire international a approuvé l’inclusion de la monnaie chinoise, le renminbi (RMB) ou yuan, dans le nouveau panier de droit de tirage spécial (DTS), le panier de devises qui sert d’actif de réserve international à l’institution (FMI, 2016). Officialisée le 30 septembre 2016, l’introduction du yuan aux côtés des autres monnaies du FMI – le dollar américain, l’euro, le yen et la livre sterling – constitue une étape fondamentale dans le processus d’internationalisation de la monnaie chinoise. La Chine a remporté ainsi une victoire au FMI, où elle mène depuis des années des négociations afin de modifier les règles de gouvernance qui lui sont peu favorables. En effet, le Président Obama avait accepté, en 2010, une réévaluation de la quote-part des pays émergents au sein de l’institution basée à New York. Les droits de la Chine au Conseil d’administration du FMI devaient passer de 4 à 6,4 % du total, et les autres membres des BRICS (sauf l’Afrique du Sud) auraient rejoint les 10 pays les plus influents l’institution. Bien que cette réforme n’aurait eu qu’une incidence minime pour les États-Unis (leur quote-part diminuant de 17,7% à 17,4%), le Congrès américain a refusé de ratifier cet accord (Jaffrelot, 2015 : 82). Ce déséquilibre dans les affaires internationales – auquel la Chine souhaite mettre un terme – est bien résumé par le diplomate singapourien, Kishore Mahbubani: « Les Asiatiques constituent 55 % de la population mondiale et n’ont jamais pu diriger le FMI et la Banque mondiale. […] Au XXIe siècle, ce sont les nations les plus démocratiques, les nations occidentales, qui font tout pour maintenir cet ordre antidémocratique […] Dans les faits, 12 % de la population mondiale prend des décisions pour tout le reste » (Mahbubani, 2008 : 120-121).

Dès l’année 2015, lorsque la BAII devint opérationnelle, la vision stratégique de la Chine semblait se dessiner puisqu’il était stipulé que la BAII octroierait des prêts libellés en renminbis. La première conférence de presse de son président, Jin Liqun, à Pékin le 17 janvier 2016, signe la fin du suspense car il annonce que la banque utilisera le dollar américain comme monnaie de prêt (Dieng et Liu, 2015 : 528). Si la suprématie du dollar reste incontestable sur les marchés financiers internationaux, il n’en demeure pas moins que la monnaie chinoise s’exporte de plus en plus. En Afrique par exemple, le Ghana, le Nigeria, Maurice, le Zimbabwe et l’Afrique du Sud notamment utilisent déjà le yuan comme monnaie de règlement et de réserves. De plus, le RMB est désormais la deuxième monnaie la plus utilisée en Malaisie dans les transactions commerciales, où il a enregistré une hausse de près de 215 % sur les trois dernières années. Enfin, depuis 2014, la Chine et Singapour convertissent leur monnaie sans avoir recours, comme par le passé, à une monnaie étrangère (Hache, 2016).

Deuxième créancier des États-Unis derrière le Japon, l’État chinois devrait se servir de la BAII pour diversifier ses investissements – qui se sont concentrés vers le rachat des bons du Trésor américains[8] et européens[9] ainsi qu’une partie de la dette grecque (Dieng et Liu, 2105 : 530) – vers les infrastructures en Asie-Pacifique dans plusieurs secteurs-clés (transport, télécommunication, assainissement, protection de l’environnement, énergie, électricité, etc.). À travers le projet OBOR, Pékin cherche à favoriser la croissance économique dans le pays. Comme le résume Charles Parton, un diplomate européen anciennement en poste en Chine, le projet OBOR est « une politique domestique avec des conséquences géostratégiques plutôt qu’une véritable politique étrangère » (Hancock 2017). Agissant en tandem avec le projet OBOR, qui regroupe – rappelons-le – 65 pays soit 60% de la population mondiale, la BAII devrait conduire les entreprises chinoises à se positionner sur un marché global extrêmement compétitif. L’expansion de l’industrie des énergies renouvelables en Chine favorise le gain des parts de marché à l’étranger. Même si les entreprises chinoises ont toujours tendance à acheter des brevets dans les laboratoires américains et européens, les autorités misent dans le secteur énergétique sur une politique d’innovation à haute valeur ajoutée.

Conclusion

Selon la première hypothèse présentée dans cet article (la plus récurrente dans la littérature), la Banque asiatique d’investissements dans les infrastructures a été conçue pour servir les intérêts de la Chine et concurrencer l’ordre international établit par les États-Unis depuis la fin de seconde guerre mondiale. Or, les nombreux partenariats qui lient la BAII et les institutions américaines (Banque mondiale et FMI) ou asiatique (BAD) infirment cette proposition. La BAII est toutefois indissociable du projet des nouvelles routes de la soie (hypothèse n°2). À cet égard, la banque multilatérale compose l’un des outils de la « diplomatie du pourtour (zhoubian waijiao) » (Cabestan, 2007 : 17) grâce à laquelle Pékin ambitionne de reconfectionner l’environnement sécuritaire en Asie du Sud-Est et promouvoir des normes et des principes chinois (hypothèse n°3). Certains académiques chinois suggèrent que cette diplomatie périphérique s’oriente vers un « nouveau modèle de relations entre grandes puissances » (new model of major power relations, 新型大国关系), une suggestion de Xi Jinping faite à Obama, qui viserait à inclure la Russie, l’Inde et le Japon (Jin, Duan, 2013 : 14). Mais depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche, cet élément de langage semble avoir été abandonné.

À moyen terme, la Chine devrait profiter de l’échec annoncé du partenariat transpacifique (TPP) pour intensifier les échanges commerciaux avec ses voisins d’Asie du Sud-Est. Le fait que le TPP soit entériné participe à la mauvaise réputation des États-Unis dans la région, établie depuis la guerre du Vietnam puis confirmée lors de la crise financière de 1997, partie de Thaïlande, lors de laquelle non pas les Américains mais bien la Chine est intervenue et a fait preuve de responsabilité en maintenant inchangée la valeur du yuan (Boulanger et al., 2008 : 104).

Les premiers projets approuvés par la BAII démontrent la volonté de la Chine de sécuriser ses approvisionnements énergétiques en provenance du Moyen-Orient et également de renforcer ses liens avec les États d’Asie centrale en invoquant le sens de l’Histoire. Les infrastructures sont indispensables à la réalisation de ce dessein et les projets de la BAII devraient favoriser les entreprises chinoises à se positionner dans ce secteur (hypothèse n°4). La Chine a appris des expériences du régionalisme économique africain et sud-américain pour lesquels le manque d’infrastructures constitue un frein à davantage d’intégration. Le pragmatisme des dirigeants chinois les a amenés à porter une attention particulière au besoin d’infrastructures en Asie. Sur la période de la prochaine décennie, la Banque asiatique de développement estime ce besoin à 8 000 milliards de dollars américains (Dollar, 2015). Si cette carence représente une fenêtre d’opportunité pour Pékin, de nombreuses incertitudes entourent encore le projet OBOR et la BAII. Il faudra attendre sans doute plusieurs années avant que ne s’ouvre véritablement une ère eurasiatique.


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Notes de bas de page

[1] Dans l’Accord d’adhésion de la Chine à l’OMC, les dispositions de l’article 15 sont sujettes à interprétation. En effet, l’article souligne que les autres pays membres de l’OMC peuvent ne pas reconnaître la Chine comme une économie de marché dans la situation où une stratégie de dumping sur l’exportation de produits à très bas coûts serait établie. Le dernier paragraphe de l’article précise : « In any event, the provisions of subparagraph (a)(ii) [la présomption que la Chine est une économie non marchande] shall expire 15 years after the date of accession », soit le 11 décembre 2016. Organisation mondiale du commerce (2001). Accession of the People’s Republic of China, WT/L/432, 23 novembre. https://www.wto.org/english/thewto_e/acc_e/a1_chine_e.htm, c. 6 mai 2017.

3 Selon la définition de van Bergeijk et Moons, « la diplomatie économique consiste en un ensemble d’activités visant les méthodes et procédés de la prise internationale de décision et relatives aux activités économiques transfrontières dans le monde réel. […] Elle a comme champs d’action le commerce, l’investissement, les marchés internationaux, les migrations, l’aide, la sécurité économique et les institutions qui façonnent l’environnement international, et comme instruments les relations, la négociation, l’influence ». Van Bergeijk, Peter A. G. et Moons, Selwyn (2009). Economic Diplomacy and Economic Security. Dans Carla Guapo Costa (ed.). New frontiers for economic diplomacy, Universidade Técnica de Lisboa, Instituto Superior de Ciéncias Sociais e Politicas : 37-54.

[3] La pensée d’Antonio Gramsci représente la principale source d’inspiration de Robert Cox. En outre, celui-ci est l’un des premiers théoriciens à avoir développé une analyse de l’hégémonie dans sa dimension transnationale.

[4] Les pays représentés sont : l’Arabie saoudite, la Turquie, la Thaïlande, la Chine, la Corée du Sud, l’Égypte, l’Australie, la Grande-Bretagne, la Russie, l’Allemagne, l’Inde et l’Indonésie.

[5] L’architecture de l’ASEAN a été modifiée à plusieurs reprises. Les membres fondateurs sont l’Indonésie, la Malaisie, les Philippines, Singapour et la Thaïlande, rejoints ensuite par le Brunei (1984), le Vietnam (1995), la Birmanie et le Laos (1997) puis le Cambodge (1999). En 1997, l’association s’est étendue à 3 autres pays (la Chine, le Japon et la Corée du Sud) pour former l’ASEAN +3.

[6] Créée en 2001 et héritée du Groupe de Shanghaï (1996), l’OCS est une organisation intergouvernementale régionale d’Asie. Les États membres et fondateurs sont: la Chine, la Russie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan et l’Ouzbékistan. L’Inde et le Pakistan ont intégré l’organisation en 2016. Les États observateurs sont: l’Afghanistan, l’Iran, la Mongolie et la Biélorussie. Enfin, les partenaires de dialogue sont: le Sri Lanka, la Turquie, le Cambodge, l’Azerbaïdjan, l’Arménie et le Népal. La raison d’être de l’OCS est d’ordre sécuritaire. Le siège de l’organisation se trouve à Pékin tandis que la structure anti-terroriste régionale est installée à Tachkent, en Ouzbékistan. Les résultats concernant la coopération économique entre les États demeurent limités, comme en témoigne l’échec de la Communauté économique eurasiatique. C’est pourquoi la Chine envisage de cimenter les liens économiques avec ses voisins grâce au projet des nouvelles routes de la soie.

8 Les documents officiels relatifs à ces projets (approuvés ou en attente de l’être) sont disponibles en ligne sur le site de la BAII: http://euweb.aiib.org/html/2016/PROJECTS_1010/163.html c. 13 mai 2017.

9 Le montant de bons du Trésor américains détenu par la Chine, en mars 2017, s’élevait à 1087,6 milliards de dollars américains. http://ticdata.treasury.gov/Publish/mfh.txt, c. 22 mai 2017.

10 En Europe, les bons du Trésor sont appelés obligations d’État ou obligations souveraines. Les données relatives à la détention par les non-résidents de ces titres sont considérées comme sensibles et donc ne sont pas rendues publiques par la Banque populaire de Chine (The People’s Bank of China), ni par les organismes européens (Agence France Trésor, Bundesrepublik Deutschland – Finanzagentur GmbH en Allemagne, Dipartimento del Tesoro en Italie, etc.).