L’aménagement du territoire: plaidoyer en faveur d’une approche géopolitique

Alexandre Brun1

1Maître de conférence à l’Université Paul-Valéry, Montpellier 3
Unité Mixte de recherche, CNRS « ART-DEV », Montpelletier, France, +33 (0)4 11 75 72 02
Alexandre.Brun@univ-montp3.fr

RG v1 n1, 2015


Mots-clefs : aménagement du territoire, développement, urbanisme, conflits, territoire, État, pouvoirs locaux.


La géopolitique désigne « l’analyse des rivalités de pouvoir pour des territoires ou sur des territoires et le contrôle des hommes et activités qui s’y trouvent » (Giblin citant Lacoste, 2005). L’aménagement du territoire – qui se définit comme l’ensemble des mesures conduites par les pouvoirs publics pour améliorer la compétitivité du territoire – s‘inscrit donc comme l’un des principaux objets de recherche de la géopolitique. En France, l’aménagement du territoire a été la « chasse gardée » de l’administration publique de l’après-guerre aux années 1980 au fil des « plans » et du fait de l’expertise de la DATAR. Après quoi un glissement s’est opéré de l’aménagement du territoire à l’aménagement des territoires en raison de la décentralisation, du renforcement de la coopération intercommunale et de l’européanisation des politiques publiques relatives à l’agriculture, à l’environnement, au développement territorial et aux transports.

Les collectivités territoriales incarnées par les élus locaux et leurs services techniques ont, ce faisant, vu leurs compétences étendues en matière d’aménagement et leurs moyens renforcés aux dépens de l’État. Ainsi, la situation de la France se rapproche-t-elle désormais de la plupart de ses voisins européens (Espagne, Italie, Allemagne, etc.) où le pouvoir central doit naturellement composer avec des pouvoirs locaux. La scène locale européenne compte de surcroît de nouveaux acteurs issus de la « société civile » (syndicats, ONG, riverains, etc.). Sous l’impulsion du législateur et du fait des injonctions du développement durable, des groupes d’intérêts variés et aux intérêts souvent contradictoires imposent désormais un nouveau rythme à la puissance publique et contribuent singulièrement à la « judiciarisation » de la société en multipliant les recours dans le cadre des procédures d’aménagement.

Entre, d’une part, la paralysie de la politique d’aménagement (plus une autoroute, plus un grand équipement n’est réalisée sans conflits), et, d’autre part, l’aménagement pratiqué en dépit du bon sens (opérations d’urbanisme en zone inondable, construction d’équipements plus concurrents que complémentaires, etc.), la politique d’amé­nagement est au centre des préoccupations des pouvoirs publics. Les travaux en géopolitique de l’aménagement du territoire – à commencer par ceux de P. Subra – permettent d’éclairer sous un jour nouveau un objet familier des géographes tout en promouvant une méthode originale à la limite de l’investigation journalistique au sens le plus noble du terme.

Références bibliographiques

Philippe Subra, 2007, Géopolitique de l’aménagement du territoire, A. Colin, coll. Perspectives Géopolitiques, Paris, 327 p