Joseph Tchinda Kenfo1
1 Docteur (PhD) en Histoire (Relations Internationales), Université de Yaoudé, Cameroun
Vol 3, n 3, 2017
À propos de l’auteur
Titulaire d’un Doctorat PhD en Histoire, option Relations Internationales de l’Université de Yaoundé I et ancien normalien, Joseph Tchinda Kenfo est Diplômé en Études stratégiques à l’Université de Yaoundé II-Soa, en Développement international de la Dale Kietzman Academy – USA, en Développement durable à l’Université Niccolo Unicusano de Rome et achève actuellement un Diplôme d’Études Supérieures Spécialisées en Planification Territoriale et Développement Local à l’Université du Québec à Montréal.
Résumé : Plusieurs décennies après leur disparition, le souvenir du Général De Gaulle et de son protégé Jacques Foccart hante encore les esprits et alimente les polémiques. Il ne se passe un jour, sans que la nature des liens d’exclusivité dits « personnalisés » voire clientélistes et ritualisés qu’ils auraient noué entre certains présidents africains et eux et par ricochet la France ne fasse l’objet d’un reportage ou d’un ouvrage/article. Seulement, tandis que les humanitaires et autres cercles de la société civile en Afrique dénoncent ces pratiques d’un autre âge, d’autres voix, principalement en Occident, s’offusquent de ce qu’il convient désormais de nommer la Chinafrique ; cette ruée de l’empire du milieu qui serait désastreuse et sans perspectives pour le continent triangulaire. La Chine, avec son mot d’ordre pour le moins officiel de coopération gagnant-gagnant, est-elle une chance ou un problème pour l’Afrique ?
Summary: Several decades after the death of General De Gaulle and his fellow Jacques Foccart, their memory is still haunting people’s mind and fuels the controversial. One can’t spend a day without the nature of the so-called “personalized” or even clientelist and ritualized ties that they would have established between some african presidents and themselves, and by the way France, be the topic of a report, a book or an article. However, while humanitarians and other civil society circles in Africa expose these old age practices, other voices, especially from the West, are offended by what is being but called Chinafrica : this rush of the middle empire, that might be appalling and with no prospects for the continent. Is China, with its watchword for the less official winner-winner cooperation, a chance or a problem to Africa?
Mots-clés: Afrique, Françafrique, Chinafrique, partenariat, équitable.
Keywords: Africa, Francafrica, Chinafrica, partnership, impartial.
Introduction
Après plusieurs siècles de domination, d’exploitation, de pillage et de déni de l’Afrique par l’Occident, le continent est aujourd’hui au cœur de nombreux enjeux. L’action des nations occidentales, au lendemain des Indépendances, a donné lieu dans la sphère francophone à ce qu’il est convenu de nommer la Françafrique, caractérisée par la cacophonie institutionnelle des centres de décision, des relations de clientélisme et la constitution de réseaux conduisant à des financements occultes des partis politiques de l’Hexagone. Daniel Bourmaud va plus loin en notant que « les coups tordus en constituent la trame, ou à tout le moins, en composent largement la substance » (Bourmaud, 2011). Longtemps dénoncée, cette approche de la politique suscite encore la controverse de ceux-là qui appellent au renouveau. Dans ce contexte, la Chine, forte de son succès, intrigue le monde entier, particulièrement les puissances occidentales, et le poids grandissant qu’elle prend sur le continent est source de nombreuses inquiétudes. L’approche chinoise sous-tendue par un soft power, qui étend sa sphère d’influence, accède aux ressources minières tout en érigeant des infrastructures de part et d’autres à travers le continent (Hugon, 2016), est dénoncée par les anciens maîtres d’hier. En effet, après des contacts très anciens et un tour en Afrique au début des années 1960 à l’occasion des indépendances et sur fond de guerre froide, la Chine est aujourd’hui de retour par la grande porte, accueillie sur le tapis rouge par les dirigeants africains. Elle arrive plus ambitieuse, plus déterminée, avec les moyens pour tirer profit des ressources naturelles afin de soutenir sa croissance et son développement (Richer, 2008, 2013). Ce retour, sur fond de discours sur le « partenariat gagnant-gagnant » et qui se fait au détriment des anciennes puissances coloniales, représente-t-il un avantage ou un inconvénient pour le continent ? L’Afrique peut-elle dans ce redéploiement du jeu des puissances tirer son épingle du jeu ou est-elle plutôt entrain de remplacer un maître par un autre ? Dans la suite de notre contribution, nous allons d’abord présenter la Françafrique et ses avatars, ensuite exposer la percée de la Chine et le redéploiement du jeu de puissances sur le continent et enfin proposer des pistes de sortie.
1. La Françafrique et ses avatars
La singularité des relations franco-africaines n’en finit pas d’intriguer l’observateur au point, note Daniel Bourmaud, de susciter des réactions où se combinent l’analyse et l’opprobre (Bourmond, 2011). Comme le faisait remarquer Antoine Glaser, l’amalgame entre la France-Afrique et la Françafrique empêche de comprendre, à la fois le passé et le présent (Glaser, Smith, 2008). Au fait, le terme Françafrique est une expression qui aurait été utilisée pour la première fois par François-Xavier Verschave pour désigner la nébuleuse d’acteurs économiques, politiques et militaires en France et en Afrique, organisée en réseaux et lobbies, et polarisée sur l’accaparement de deux rentes : les matières premières et l’Aide Publique au Développement (APD) (Verschave, 1998). Il se serait inspiré de l’expression France-Afrique forgée par le feu président Félix Houphouët-Boigny en 1955, pour magnifier l’imbrication de l’ex-métropole et de ses anciennes colonies (Glaser, Smith, 2008).
Il semble qu’il s’agisse en réalité d’une diplomatie parallèle faite d’émissaires officieux, de complaisances de toutes sortes, de nombreuses ambigüités et secrets. D’ailleurs, de nombreux noms à l’instar de Jacques Foccart, De Gaulle, Alain Joyandet, Robert Bourgi, Jacques Attali, Omar Bongo, et bien d’autres évoquent cet épisode. Par ailleurs, la Françafrique est une véritable nébuleuse où il est plus question de sollicitudes particulières accordées à tel ou tel autre dirigeant pour des intérêts spécifiques plutôt que pour le développement du continent : d’où la gestion assez opaque, à l’abri de tout regard officiel desdites relations (Traore, 2001).
Cette approche permettait à la France de soutenir les régimes brutaux, ce au-delà de 1960, afin de pérenniser ses intérêts. Le simulacre de démocratie accompagnait au besoin le décor (Traore, 2002). Sans rejeter cet état de fait, Péan relève qu’elle représente un efficace écran de fumée (Péan, 2010; 2012). Elle a également contribué à l’appauvrissement du continent et renforcé la dépendance (Michel, Beuret, 2008). Sans oublier le droit de préemption, c’est-à-dire l’exclusivité prioritaire de la France sur les richesses connues et à découvrir dans ses anciennes colonies en Afrique garantis par les accords de 1960.
En conséquence, l’Afrique francophone a vu échouer presque tous les programmes de développement et est restée une victime éternelle des guerres, des dictatures, des génocides, des épidémies, etc. Pour preuve, un des exemples les plus marquants de cette exploitation éhontée est la Guinée-Conakry qui détient les premières réserves mondiales de bauxite sans que la population n’ait accès à l’électricité, à l’eau, etc. (Michel, Beuret, 2008). La France est également impliquée depuis plusieurs décennies dans la déstabilisation du continent, les assassinats politiques, les interventions militaires. À titre d’exemple, nous pouvons citer entre autres les opérations Manta au Tchad entre 1983 et 1984; Almandin en RCA entre 1996-1997; Pélican au Congo Brazzaville en 1997, etc (Mathias, 2014).
À côté de cela, il ne faut pas oublier les effets négatifs du contrôle monétaire des pays de la zone du franc. En effet, avec chacun de ces pays, la signature de l’acte d’indépendance était assortie de pactes secrets, de dispositifs de défense et de conventions diverses qui accordent des avantages exorbitants à la France sur les ressources du pays concerné ; ceci devant se faire dans le cadre d’une prétendue union avec la France. Le Tchad[1], le Congo Brazzaville[2] et le Cameroun sont des éléments importants du dispositif. Le cas du Gabon est assez spécial. En effet, Omar Bongo était un agent des services secrets français. Ce pays a également joué un rôle actif dans les ingérences françaises au Nigéria. En fait, pendant la guerre de Sécession de la région du Biafra en mai 1967, la France a soutenu la désintégration du Nigeria (Maillard, 2008; Bach, 1982) et fait du Gabon sa base arrière pour ses interventions militaires dans ladite région ; ce de 1967 à 1970 (Nguong Moussavou, 2012 ; Beucher, 2010 ; Bourmaud, 2011). Par ailleurs, l’affaire Elf, ancêtre de Total, impliquant ses dirigeants et les personnalités françaises est révélatrice de l’ampleur du pillage. Le pétrole produit par la filiale gabonaise était revendu à la maison mère en dessous du prix du marché. La différence était ainsi répartie entre différents protagonistes dont le président gabonais, à travers des places off-shore et de la FIBA banque dont les bureaux étaient situés dans locaux de la Elf (Nguong Moussavou, 2012). Une autre illustration du pillage des richesses de l’Afrique Noire francophone est la relation du Franc CFA au trésor français. Il est fréquemment avancé qu’en vertu des accords monétaires, la France prélèverait actuellement 50% du montant total des transactions contre 70% il y a encore quelques décennies ; ce afin de garantir la convertibilité de ladite monnaie. Info ou intox, aucun dirigeant français ni africain ne s’est jamais montré intéressé par la question qui curieusement ne fait d’ailleurs pas partie du débat politique en France, intérêt national oblige. Tout ce que l’on sait c’est que depuis quelques années, certains présidents africains notamment Équato-guinéen, Tchadien, Congolais, sans clairement communiquer sur leur teneur, appellent à une révision des accords monétaires qui à leur état actuel seraient l’une des causes de l’échec de l’Afrique noire française. Aujourd’hui, il devient un peu plus clair que l’une des causes de la crise ivoirienne était le désir de l’ex-président Laurent Gbagbo de battre une monnaie pour la Côte d’Ivoire (Nane Tory, 2009).
La présence militaire française est également vécue dans de nombreux pays comme des forces d’occupation, d’ingérences néocoloniales, qui ont toujours refusé de déclencher les accords de défense pour protéger les institutions républicaines lorsque leurs intérêts étaient en jeu. Le cas de la Côte d’Ivoire une fois de plus est significatif à cet égard. Le déploiement des troupes françaises lors des évènements de Bouaké au mois d’août a amplifié la controverse. Déjà dès le début la crise post-électorale de 2000, on a vu les camera de TF1 sur place dans le Nord, plus précisément à Bouaké, rapidement donner la parole aux rebelles (baptisés les forces nouvelles) et point n’est plus besoin de rappeler que cette chaine est la propriété de Martin Bouygues (Michel, Beuret, 2008). Au final, ce « pré carré », champ d’intervention privilégié de la diplomatie française en Afrique, est essentiellement constitué par d’anciennes possessions coloniales (Maghreb, Afrique occidentale et équatoriale françaises, Madagascar). Le maintien de l’influence de la France dans ces États devenus indépendants sur le plan politique, militaire mais aussi économique, pose la question du prolongement de la domination coloniale qu’y exercerait l’ancienne métropole, ainsi que celle de la réalité des indépendances que l’on qualifie parfois de « formelles » à défaut d’être totalement « effectives » (Beucher, 2010). Rien d’étonnant dans la mesure où Patrice Emery Bakong soutient que la politique militaire française en Afrique repose sur l’idée de mettre en place des mécanismes permettant de profiter des avantages économiques et stratégiques qu’offre le continent en tant que réservoir des matières premières et comme plate-forme stratégique et de garantir aux États la stabilité et la sécurité nécessaires à l’exploitation de ces bénéfices (Bakong, 2016). Au demeurant, le patrimonialisme a survécu à De Gaulle parce qu’il a toujours été, non seulement au service de la puissance, mais aussi la condition de l’accomplissement de la politique de puissance voulue par la France (Bourmaud, 2011). Ainsi, ce sombre passé est-il suffisamment traduit, ou du moins assumé, tout au long de la campagne présidentielle 2017 ?
2. Percée de la Chine et redéploiement du jeu de puissances en Afrique
Serge Michel et Michel Beuret sont formels : en quelques années, la Chine en Afrique est passée de sujet pointu pour spécialistes de la géopolitique à un thème central dans les relations internationales et la vie quotidienne des populations (Beuret, Michel, 2008 ; Mbeng Ndang, 2015). En 2007, il y aurait 500.000 Chinois vivant sur le continent et cela va de soi : les Chinois ont pénétré l’imaginaire du continent. Elle n’est pas rebutée à l’absence de démocratie, ni à la corruption. Les Chinois trouvent des opportunités là où d’autres ne voient que l’inconfort[3]. Pour alimenter sa croissance démesurée, la République Populaire de Chine a un besoin vital en matières premières dont le continent regorge : le pétrole, les minerais, le bois les poissons, les produits agricoles (Beuret, Michel, 2008). Elle entretient des relations particulières avec le Nigeria, l’Angola, le Soudan, l’Afrique du Sud, l’Algérie, l’Éthiopie ; tous grands producteurs de métaux précieux, de pétrole et de minerais (Cabestan, 2015).
À cause de tous ces enjeux, l’Afrique n’est plus le continent à la dérive d’autant plus que cet appétit de la Chine pour ses matières premières a changé la donne. Le continent noir connaît une croissance sans précédent et suscite à nouveau les convoitises (Tamekamta Zozime, Mbeng Ndang, 2015). Les centaines de milliers de chinois qui s’y précipitent ont une longueur d’avance. Ils séduisent les chefs d’État, parce qu’ils investissent et ne parlent pas de démocratie, et les peuples parce qu’ils construisent des routes ou des barrages. Ceci pousse d’emblée à s’interroger : les Occidentaux se laisseront-ils évincer ? Quelles sont les conséquences écologiques de cette nouvelle ruée vers l’or ? Surtout que la Chine se lance là à la conquête d’une terre que l’Occident, dans un discours plein d’hypocrisie, jugeait tout juste bonne à recevoir de l’aide humanitaire (Beuret, Michel, 2008). Au demeurant, il n’est pas totalement faux que certains estiment que les Occidentaux ont aidé la Chine à s’imposer partout en Afrique sur les projets de grande échelle. En effet, face aux prescriptions de la Banque Mondiale notamment l’obligation de soumettre les travaux d’infrastructures à des appels d’offres, les Chinois gagnent à tous les coups, grâce à une main-d’œuvre bon marché, des économies d’échelle et sur les faux frais.
En réalité, la relation qui à la base était idéologique (avec la montée du communisme au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale), diplomatique (isolement de Taïwan oblige), et stratégique a évolué en Afrique avec l’émergence économique (Cabestan, 2015). Ce pays offre également en Afrique son modèle de développement, le
« consensus de Pékin » au lieu de la pilule amère du « Consensus de Washington» prôné par la Banque mondiale et ayant conduit aux privatisations, à la démocratie, à la décentralisation à la transparence avec toutes les conséquences et dérives qui s’en suivirent. Cette aide permet aux pays africains de s’affranchir potentiellement des programmes du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale (Pean, 2010) ainsi que de leurs exigences en matière de gouvernance elles-mêmes sujettes à caution. Leurs ouvriers vivent dans les chantiers, travaillent 24h/24 et impressionnent les masses. Leurs ingénieurs vivent dans des containeurs aménagés auprès des chantiers/ouvrages à l’opposé des Occidentaux qui sont dans des hôtels 5 ou 4 étoiles ; ce qui, à coup sûr, impacte sur les coûts des projets.
Bien plus, il est clair que l’œuvre de corruption de la « Françafrique » a préparé le terrain à la Chine qui, elle aussi, sait agir en zone trouble. Et la France particulièrement est bien mal placée pour donner des leçons : elle recule dans tous les domaines au profit de la Chine. Cette dernière dispose de délégations commerciales dans 49 pays, empiète sur le pré-carré français ; l’a dépassé en 2007 en termes de volume d’échanges (69 milliards de dollars contre 56 pour la France) ; dans les BTP, affiche des prix de 30 à 50% inférieurs aux Français. Pour preuve, au sujet de l’élargissement d’un tronçon d’autoroute à la sortie de Dakar, le groupe français Fougerolle rebaptisé Eiffage a fait une offre de 43 milliards de Francs CFA contre les 23 milliards du groupe Henan-Chine. Il en est de même de la réhabilitation du réseau d’eau de la ville de Touba qui a vu une offre française de 50 milliards de francs CFA supplantée par celle du groupe Henan-Chine de 13 milliards (Beuret, Michel, 2008).
À côté de ces prix abordables, il faut dire que la Chine écoule les produits simples et bon marché, retape les routes, les voies ferrées, les bâtiments officiels. Qui n’a pas en mémoire le tristement célèbre immeuble de la mort à la poste centrale de Yaoundé au Cameroun autour duquel l’imagerie collective avait construit tous les fantasmes. Il se disait que le bâtiment était instable au passage du train souterrain d’où l’imminence de sa destruction. Pourtant, les ouvriers chinois grâce au financement de la CNPS (Caisse nationale de prévoyance sociale-Cameroun) l’ont réhabilité et il fait aujourd’hui la fierté des populations et suscite la curiosité et l’émerveillement. On a également la construction des barrages au Cameroun (Lom Pangar, Mékim, Memvele, etc.), au Soudan, au Congo, en Éthiopie ; l’équipement de nombreux pays notamment le Cameroun en réseau sans fil et en fibres optiques ; la construction les hôpitaux à l’instar des trois hôpitaux de référence au Cameroun que sont les hôpitaux gynéco-obstétriques de Yassa (Douala) et de Ngousso (Yaoundé) et de Sangmélima ; la construction des édifices publics (siège de l’Union Africaine à Addis-Abeba, palais des congrès de Yaoundé au Cameroun, palais des sports de Yaoundé) ; des stades, des autoroutes, etc. À la condescendance de l’Occidental, le Chinois oppose la discrétion.
À titre de rappel, en février 2014 sur 15 projets prioritaires du gouvernement camerounais, la Chine avait consenti à financer 12 dont le backbone national à fibre optique, les barrages de Mékin et de Memvé’élé (420 milliards de FCFA – environ 640 millions d’euros), le port en eau profonde de Kribi (287 milliards de FCFA – environ 437 millions d’euros), de l’autoroute Yaoundé-Douala (241 milliards de FCFA – environ 367 millions d’euros), etc. Enfin, des privés chinois opèrent dans l’exploitation agricole, dont l’homme d’affaire Wang Jianjun (protocole d’accord signé en 2006 avec l’État camerounais) prévoit une concession de 10 000 ha près de Nanga Eboko (Région du Centre), etc. Mis à part les prêts accordés au Cameroun, la Chine est le premier pourvoyeur de fonds dont l’aide publique au développement, entre 2009 et 2011, se chiffrait à 707 758 milliards de FCFA (contre 560,081 milliards de FCA accordés par l’Europe) sur un total 2 070,722 milliards de francs CFA de financements reçus (Tamekamta Zozime, 2016).
Bref, une diplomatie de chéquier avec des prêts « sans conditions », des dettes qui à vrai dire ne sont pas « sans conditions que cela » . Les Chinois ont certainement bien compris qu’avec l’homme africain, il y a toujours un moyen de s’arranger entre nous ; c’est-à-dire que lorsqu’une éventuelle entente bipartite bute sur des normes, des lois ou des règles de droit, on n’hésite pas à les contourner en trouvant une solution à l’amiable qui arrange tout le monde (Mba-Ondo, 2010). On aurait plutôt relevé que les Chinois ont compris qu’au lieu d’agresser, de créer des guerres pour s’approprier les ressources du continent via les mouvements rebelles, il fallait procéder par l’esquive, l’hypocrisie et autres subterfuges[4].
À côté de l’installation d’entrepreneurs, d’investisseurs, de boutiquiers (à l’instar de Chinatown à Akwa à Douala au Cameroun), on a de nombreux investissements qui possèdent les vertus multiplicatrices notamment, comme nous l’avons déjà relevé, les infrastructures, les télécoms, le tourisme, le textile, l’industrie alimentaire plus porteurs d’emplois, de stabilité et de transfert de technologie que l’aide humanitaire de l’Occident. Il n’est pas surprenant qu’au regard de cela et nonobstant les aspects négatifs que cette stratégie chinoise soit encensée par les officiels. D’ailleurs, Serge Mombouli, conseiller de la présidence à Brazzaville, que cite Serge Michel, relève que: « Les Chinois nous offrent du concret et l’Occident des valeurs intangibles. Mais ça sert à quoi la transparence, la gouvernance si les gens n’ont pas d’électricité, de travail ? La démocratie, ça ne se mange pas » (Michel, Beuret, 2008). Et du concret, les exemples sont légion : construction du nouveau siège de la télévision congolaise, du nouveau ministère des affaires étrangères et de la francophonie (vrai paradoxe en terre francophone), construction de l’autoroute au Soudan entre Khartoum et Port-Soudan, 15 milliards de dollars d’investissements entre autres dans les puits de pétrole qui fournissent à la Chine 10 à 30% de ses importations (Michel, Beuret, 2008). Parallèlement à cette intense activité des entreprises chinoises, on note une offensive diplomatique qui se traduit par l’organisation de rencontres multilatérales ; en témoignent les sommets Chine-Afrique de 2009 en Égypte, les forums Chine-Afrique de 2000 et 2006 à Pékin et de 2003 en Éthiopie.
Associée à ces aspects diplomatique et commercial, on note également une vaste offensive culturelle qui se traduit par l’enseignement du Mandarin dans de nombreuses écoles notamment au Cameroun, au Congo, avec également la prolifération des centres Confucius au Kenya, au Cameroun, au Zimbabwe, en Afrique du Sud, au Rwanda, à Madagascar, à l’Île-Maurice, en Égypte et l’échange d’universitaires. Il est donc clair que nonobstant sa présence économique, la Chine semble s’être lancée dans une conquête culturelle du monde. Elle prévoit d’ailleurs installer un million d’Instituts Confucius à travers le monde d’ici 2020. Elle a donc des objectifs clairs qui s’inscrivent dans une cohérence absolue, réalisme économique et politique oblige (Mba-Ondo, 2010). Pierre Péan note d’ailleurs que la politique africaine de la Chine s’inscrit dans le cadre plus large d’une stratégie de contournement ou d’affaiblissement des puissances occidentales, principalement les États-Unis dans un contexte international perçu par Pékin comme « complexe » , c’est-à-dire peu favorable aux intérêts chinois (Pean, 2010).
Comme autre aspect négatif de cette présence chinoise, nous avons les réactions d’autres acteurs internationaux. Ceci se traduit par la montée des tensions et l’instabilité dans de nombreux pays notamment au Nord du Niger depuis l’arrivée des Chinois dans la prospection de l’uranium, bousculant le monopole d’Areva[5] ; la surprenante et rapide déstabilisation du Nord du Nigeria par la secte islamiste Boko Haram ; l’instrumentalisation des conflits internes et de la segmentation de la population, le discours sur la supposée divergence Nord/Sud qui refait surface un peu partout notamment au Soudan et qui a entraîné la division du pays en deux et la création de l’État du Sud Soudan avec les conséquences actuelles et à venir ; la désormais question de l’instabilité du Sahel, etc. Bien plus, cette présence chinoise en Afrique, au-delà des conséquences néfastes directes, entraîne des effets dévastateurs indirects. Pour preuve, la projection des USA à travers le commandement militaire intégré (Africom) pour contrer leur présence. En conséquence, le jeu des puissances se redéploie avec à la clé les guerres par procuration, la déstabilisation des régions entières, la construction des bases militaires dans plusieurs pays du Golfe de Guinée. Il ne s’agit non plus de laisser croire que la Chine est en odeur de sainteté sur le continent. Elle alimente de nombreux conflits en armements, a appuyé l’UNITA de Jonas Savimbi lors de la guerre civile angolaise et conclu des alliances peu recommandables avec le régime de l’Apartheid. À ces déstabilisations, dont les causes sont multiples, s’ajoutent des envolées lyriques, des constructions idéologiques et manipulations d’un autre genre.
3. Chine-Occident : deux faces de la même monnaie ou les voies d’un partenariat
équitable
Grand centre de production et d’échanges, premier exportateur et 2e importateur, la Chine est presque « la seule usine du monde ». Elle est désormais obligée de rechercher sans cesse les nouveaux marchés extérieurs pour écouler ses produits ainsi que les ressources naturelles et matières premières pour alimenter les lignes de production. Elle a réussi son intégration parmi les grandes puissances économiques de la planète et représente environ 12% de l’économie mondiale contre 15% pour les USA. Son influence diplomatique augmente rapidement et son outil militaire est devenu de plus en plus puissante. Ainsi, elle est plus que jamais obsédée par l’idée de puissance « globale » ou
« complète » c’est-à-dire à la fois politique, économique, militaire, culturelle, etc. Fort de cela, il est de plus en plus admis que les Chinois embrassent pleinement le jeu de l’interdépendance, capitalisant sur leurs succès économiques, s’efforçant d’accumuler autant d’influence que de puissance. Elle serait même, elle aussi, atteinte de l’autisme des grandes puissances n’écoutant plus les autres pays et s’enfermant chaque jour un peu plus dans ses propres rêves (Cabestan, 2015). Par conséquent, ses objectifs en Afrique comme dans les pays en développement sont clairs : sécuriser l’approvisionnement de son économie en produits énergétiques et alimentaires ainsi qu’en matières premières ; favoriser la construction de nouvelles coalitions diplomatiques susceptibles d’appuyer ses intérêts et affaiblir les USA (Cabestan, 2015). On comprend d’ailleurs pourquoi Roy Zhang, interrogé par Serge Michel affirme : « La Chine utilise l’Afrique pour arriver au niveau des États-Unis puis les dépasser. Pour cela, elle est prête à tout, comme construire un chemin de fer au Nigeria qui sera toujours déficitaire et lancer en orbite le satellite, etc.» [6]. Son implication dans la destruction des écosystèmes du bassin du Congo est sans précédent. Il en est de même des ressources halieutiques. À titre d’exemple, Zhang Jiagang, près de Shangaî, est le premier port mondial en commerce de bois tropicaux. Aussi, en 2006, le Congo a exporté près d’un million de m3 de bois dont 2/3 de grumes malgré la loi qui impose de transformer 85% de la production sur place (Michel, Beuret, 2008). Aussi, la faune et la flore du parc national de Conkouati, au Nord de Pointe-Noire (Congo) sont menacées notamment du fait des forages pétroliers[7].
D’ailleurs, il est incorrect de croire que les Africains croient sincèrement aux partenariats « gagnant-gagnant », ce leitmotiv de la propagande de Pékin. Le fait est que nous assistons à une nouvelle forme de construction des rapports déséquilibrés au sein desquels les gouvernants pensent berner les populations en faisant construire quelques infrastructures. De fait, la masse populaire est admirative et méfiante ; accroissant ainsi le fossé entre l’Afrique du « haut » et celle du « bas ». La naïveté d’une partie de la population trouve son fondement dans une éducation sans substance qui continue à déstructurer la pensée, une éducation sans approche critique qui privilégie la restitution et non la remise en cause.
La Chine en Afrique n’a pas les mains propres pour ce qui est des crises politiques. Elle aurait soutenu les rebelles tchadiens afin de contraindre le gouvernement de s’éloigner de Taïwan. Au Cameroun, Charles Salé, ministre de l’Industrie, des mines et du développement technologique se vantait d’ailleurs de ce que pour l’exploration des mines solides, l’État Camerounais devait avoir 10% contre 90% pour l’investisseur chinois (Michel, Beuret, 2008). À côté de ce pillage sans égard, il faut noter la condescendance autrement ou la méfiance. En réalité, les Chinois n’apprennent pas les langues locales, ne célèbrent pas les mariages et nombreux sont les étudiants africains en Chine qui passent des années sans avoir des amis chinois ; lesquels leur adressent rarement la parole. Les cas de violence ou sévices corporels sont légion quand ils ne s’achèvent pas par des meurtres à connotation raciale. Et pour parachever, ils importent leurs restaurants en Afrique[8]. Il faut ajouter à cela les nombreuses interrogations légitimes sur la qualité des produits chinois qui inondent le marché africain, l’impact sur la santé des populations et l’artisanat local et les PME complètement déstructurées (Diakite, 2011). Les gouvernements africains ont-ils les moyens non seulement de contrôler la qualité des produits importés mais aussi d’exiger le respect de certaines normes internationales en matière de qualité ? La corruption rampante qui sévit dans les services de douanes n’est pas pour rassurer.
Sans céder à la propagande antichinoise[9] en Afrique, Déborah Brautigam note que la pression chinoise et les gouvernements africains ont failli à relever les véritables problèmes dont font face les projets chinois en cours de négociation et d’implémentation au cours des 50 dernières années notamment les relations au travail, les plaintes des populations villageoises vis-à-vis des compensations et du recasement, les manifestations violentes, les coûts sociaux des plans de modernisation (Brautigam, 2015). Il reste tout de même que des intérêts nationaux voire étatiques chinois prennent de grandes superficies de terres arables dans les pays où celles-ci sont abandonnées ou considérées comme sous-exploitées. À titre d’exemple, le groupe de Télécom chinois ZTE a créé en 2007 la filiale ZTE Agribusiness et a annoncé un projet de 2.8 millions d’hectares de plantation de palmier à huile en République Démocratique du Congo en vue de produire l’agro-gazole. 200.000 hectares ont été plantés en RDC en 2008 (Pean, 2010). Il en est de même du financement de projets nationaux stratégiques à plus de 80% ou en totalité contre des concessions forestières exploitées sauvagement sans aucune politique de développement durable (Richer, 2013).
L’un des griefs non moins importants est la désormais célèbre expression des « chantiers made in China » ; bref ces chantiers sans apport économique pour les villages ou régions concernées, avec des ouvriers chinois qui n’achètent rien dans les commerces ; se contentant à longueur de journée de boire du thé, etc. La nature des contrats proposés par les holdings chinois est également mise en cause. En effet, pour l’exploitation d’une mine, on accorde une concession territoriale sept fois plus grande avec une exemption complète de taxes sur les 25 ans que durera l’exploitation de la mine ; 10 à 15% des revenus pour l’État et le reste pour les Chinois parfois pour un investissement total d’environ 2000 milliards de franc CFA. Avec la possibilité de prospecter sur n’importe quelle zone du territoire national si ces derniers estimaient que la rentabilité de la mine n’aura pas été à la hauteur de leurs investissements.
Face à de tels défis, on est en droit de s’interroger : dans quelle mesure l’Afrique peut-elle s’inspirer du modèle et qui serait adaptables ou transférables sur le continent ? Une chose est claire, c’est que les jeunes sont affranchis du moins sur le plan politico-économique du sentimentalisme légendaire qui caractérise depuis toujours les populations et qui a pendant longtemps empêché d’être déterminés et de prendre des décisions parfois difficiles qui s’imposaient par les intérêts du continent dans les différentes négociations avec le reste du monde (Mba-Ondo, 2010).
On ne peut plus aujourd’hui invoquer la notion de présomption d’innocence et au même moment la nécessité de poursuivre également les complices fussent-ils Français ou autres, pour presque justifier les dérives de certains présidents africains. Surtout que depuis le début de la cabale médiatico-juridique contre certains présidents africains et leurs protégés pour « biens mal acquis », de plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer les complicités françaises et le fait que ces derniers paient les taxes sur leurs propriétés en France. La France en tant qu’État a le droit d’exiger le paiement des taxes sur les propriétés appartenant aux dirigeants sur son sol si cela relève de la fiscalité établie. Les relations internationales étant un jeu d’intérêts, si le fait d’encourager les présidents africains à l’évasion fiscale peut servir ses intérêts, quoi de plus normal ! Les partenariats, reposant sur des intérêts convergents et clairement définis pour les nations africaines et la France, doivent prendre le dessus sur les amitiés personnifiées. Nous voulons des relations qui reposent sur les entités étatiques et les institutions. Les relations franco-allemandes, américano-britannique, américano-canadiennes, etc. ne dépendent pas des présidents en exercice. Au-delà de quelques points d’achoppement, nous partageons les pistes proposées par Mba-Ondo pour le développement du continent notamment le renforcement des institutions, la recherche de l’efficacité, la planification des actions, l’harmonisation des politiques, la généralisation du micro crédit, la bonne gouvernance (Mba-Ondo, 2010). Il ne s’agit pas ici de faire l’apologie du néolibéralisme qui a servi d’alibi à toute une série de privatisations et à l’affaiblissement des États avec des conséquences néfastes.
Il est temps de tirer les leçons de la relation de la Chine avec l’Occident en terme de transfert de technologie et leur adaptation à l’environnement chinois, les emplois directs et indirects, etc. Ceci à coup sûr n’est possible que si on dépasse, avec la Chine, le cap du simple troc ressources naturelles contre immeubles ou infrastructures quelconques, pour exiger une transformation/pré transformation susceptible de susciter la mise en place des industries. De la sorte, on peut espérer opérer une mutation industrielle pour que la transformation locale des ressources soit effective à un pourcentage acceptable, à un niveau qui permette au continent de tirer profit de la manne que renferme la plus-value sur la valeur ajoutée et tous les millions d’emplois potentiels qui l’accompagnent (Mba-Ondo, 2010). On ne peut s’empêcher de relever, pour les soutenir, les actes courageux de renégociation des contrats miniers à l’actif de certains présidents notamment celui du Gabon relatif à l’exploitation du gisement de fer de Belinga, dans le Nord-est confié au consortium sino-gabonais COMIBEL.
Malgré la prudence affichée par la Chine quant au contrôle de la vente d’armes, il reste qu’elle a installé des unités de production d’armes légères au Soudan. Il est également clair qu’elle doit faire face à de nombreux défis : les tensions que créée sa forte colonie dans certains pays à l’instar du Cameroun, de la Zambie, du Sénégal, de l’Afrique du Sud etc. ; la Responsabilité sociale des entreprises ; le transfert de technologie et le savoir-faire ; le renforcement des investissements productifs ; la lutte efficace contre la pauvreté ; la formation et la question de l’emploi précaire ; le ré-endettement de nombreux États africains ; etc. (Cabestan, 2015). À ce sujet, Tidiane Diakité souligne que le risque le plus grand est que les « éléphants jaunes » de l’ère chinoise en Afrique ne succèdent aux « éléphants blancs » de l’époque de la guerre froide à partir du moment où les infrastructures lourdes et coûteuses ne sont pas toujours porteuses des objectifs de bien-être, de sécurité et d’environnement sain pour les populations (Diakite, 2011).
Conclusion
Au final, il est clair que la France, pour contrôler et maîtriser les enjeux politiques, sécuritaires et surtout économiques en Afrique et défendre ses intérêts, a fondé sa relation avec le continent sur des accords secrets opaques et autres collusions avec les chefs d’État via des relations personnalisées voire personnifiées qu’on a tôt fait de qualifier de France-Afrique, France à fric, peu importe. Ceci s’est, au fil du temps, poursuivi par une certaine condescendance, un déni de l’histoire, des interventions militaires de toutes sortes parfois sous le couvert de la défense des droits de l’homme et de la démocratie, et des relations monétaires qui, aujourd’hui encore, soulèvent de nombreuses questions. Les révélations et autres scandales choquants voire humiliants ont entraîné de facto de l’indignation, de la révolte si ce n’est le désamour. Le dernier en date étant la rumeur, non démentie, selon laquelle la présidence ivoirienne serait louée à l’ancienne métropole. Fort de cela, la Chine, avec son slogan « gagnant-gagnant » , non seulement gagne les cœurs, mais aussi du terrain depuis plus d’une décennie. Elle construit aussi des infrastructures/équipements moyennant l’exploitation des minerais, etc. ; donnant l’impression, pour l’instant, d’éviter toute interférence politique ou ingérence directe dans les affaires intérieures. Malgré les réalisations concrètes, quelques inquiétudes demeurent et méritent d’être relevées : l’absence de transfert de technologie, des modalités d’exécution des travaux dans les chantiers et l’épineuse question de l’emploi local, la question des prix qui affectent la compétitivité des entreprises africaines, l’absence de soutien diplomatique réel au regard de la crise libyenne, etc. Ceci soulève plusieurs questions : l’Afrique a-t-elle tort ou raison de suivre la Chine ? Cette dernière est-elle disposée à défendre le continent et à assumer sa nouvelle place sur le continent ? Même au moyen d’un engagement militaire ? Signe-t-elle des accords de défense ou est-elle juste là pour profiter de la naïveté et de la cupidité de quelques dirigeants pour signer des contrats d’exploitation des minerais et autres ressources dont elle a besoin pour soutenir son envol? Si sa stratégie s’inscrit sur le long terme elle devra y penser lorsque l’on sait que cette prépondérance chinoise ne laisse pas indifférents les Occidentaux qui suscitent çà et là des guerres afin d’intervenir. Au demeurant, il est clair que la Chine n’est pas en Afrique pour contribuer au développement, mais pour s’assurer une source supplémentaire d’approvisionnement. Tout compte fait, il ne revient pas à la Chine de garantir les intérêts du continent mais aux États et institutions africains de bâtir une stratégie d’ensemble, au regard des rapports de force déséquilibrés, afin de tirer profit de ce nouveau redéploiement du jeu des puissances.
Bibliographie
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Notes de bas de page
[1] Alors que le président Hissein Habré voulait renégocier les accords de coopération signés avec la France, et notamment de vouloir fermer les bases de l’armée française dans un contexte de découverte du pétrole, il est renversé le 1er décembre 1990 par Idriss Deby accompagné de l’officier de la DGSE Paul Fontbonne. En guise de rappel, il faut savoir que, Idriss Deby, commandant des Forces Armées du Nord (FAN) constituées par Hissein Habré pour chasser Goukouny Weddeye du pouvoir en 1982, est promu colonel. Il entre en conflit avec Hissein Habré, est exfiltré par les services français et regagne la Libye, puis le Soudan. À partir de là, on lui créé une armée sur mesure, le Mouvement Populaire du Salut (MPS) qu’on équipe à souhait. En contrepartie, la société Elf réintègre le consortium pétrolier dont elle avait été exclue.
[2] On a vu ici, Sassou Nguesso formé en Algérie, en pleine période d’insurrection aux méthodes antiguérilla, renverser le pouvoir démocratiquement élu de Pascal Lissouba, au moyen des milices Cobras armées par la France via Elf avec l’aide du Sénégal, de l’Angola et du Gabon
[3] Il est clair que la Chine a su saisir les opportunités pour opérer son retour sur le continent. La première est d’ordre politique. En effet, après la répression sanglante de la place Tiananmen, les 3 et 4 juin 1989, qui lui valut la réprobation de la communauté internationale à l’exception des États africains en qui les responsables chinois trouvèrent des alliés naturels susceptibles de lui garantir un soutien aux Nations Unies.
[4] Il est clair que les Occidentaux eux-mêmes emploient ces mêmes méthodes et n’hésitent pas basculer vers l’emploi de la guerre pour atteindre leurs buts.
[5] Or 80 % de l’électricité en France est produite grâce à l’atome.
[6] Il fait ici allusion au contrat de 8.3 milliards de dollars signé en novembre 2006 et le satellite est lancé le 14 mars 2007.
[7] Rappelons que cette recherche sismique à la dynamite se fait en plein parc.
[8] Il est clair que les Chinois sont eux aussi victimes de railleries en Afrique. Les expressions du genre « chintock» témoignent du mépris à leur égard. Aussi, les restaurants chinois dont nous faisons allusion ne constituent pas une menace pour les restaurants africains, la clientèle n’étant pas la même. Leur présence est d’ailleurs antérieure à l’expansion économique chinoise. Nous voulons juste signifier que les ouvriers chinois ne constituent pas une clientèle pour les restaurants locaux.
[9] Pour elle, les titres et reportages de médias sont devenus des données structurant l’analyse des ONG, universités, think tanks ; surtout que l’essentiel de craintes vis-à-vis des investissements chinois en matière agricole en Chine sont exprimées par l’Ouest. Ce renfermement tant clamé de la Chine cache assez mal le fait selon lequel le secteur de l’agriculture est de plus en plus ouvert en Chine aux investisseurs étrangers notamment suisses et australiens.